2007-12-25

Le Cambodge et Noël

Nouvelle du Cambodge N° 0750-F

Le Cambodge et Noël

Khemara Jati
Montréal, Québec
le 23 décembre 2007

Maintenant la culture aussi est mondialisée. Le calendrier chrétien est adopté universellement. Noël est maintenant célébré un peu partout dans le monde. Noël est la fête de la naissance de Jésus Christ. Depuis la plus haute antiquité le jour du solstice d’hivers, vers le 21 décembre est considéré comme la renaissance du soleil qui semble reprendre ses forces avec les jours qui s’allongent. Les monuments mégalithiques en Angleterre comme Stonehenge (3 500 ans avant J.C.) et en Irlande comme Newgrange (3 500 ans avant J.C.) ou en Egypte Abou Simbel (1 500 ans Avant J.C.) sont construits de telle sorte qu’au moment du solstice d’hivers, les rayons du soleil traverse un certain alignement.

Ainsi depuis la plus haute antiquité les hommes tenaient à marquer ce jour où les jours recommencent à s’allonger. Les hommes fêtaient ce jour là le renouveau de la nature et une saison nouvelle pour l’agriculture. C’était donc une fête païenne d’origine orientale. Constantin, le premier empereur romain chrétien, fit adopter par le pape Libère en l’an 354, le 25 décembre comme date de naissance du Christ. Il donne à cette fête le nom de « Naissance (en latin : natale) du soleil » car, comme nous l’avons vu, celui-ci semble reprendre vie et les jours s’allongent de nouveau. C’est aussi une période où il n’y a plus de travaux dans les champs.

A Rome, l’Eglise a adopté cette coutume très populaire qui venait de s’imposer dans le calendrier civil en lui donnant un sens nouveau : celui de Natale du Sauveur. La bible désigne le Christ comme le « Soleil de Justice » et comme « La Lumière du Monde ». Noël est un mot dérivé de Natale. Notons que les Corses continuent à appeler Noël, Natale. En choisissant ce jour du 25 décembre, Constantin fait coïncider le même jour la fête religieuse et païenne, pour permettre tout le peuple de se réjouir en même temps

Depuis la nuit des temps au Nord de l’Europe, le patriarche de la communauté distribuait ce jour là des cadeaux aux enfants sages et des punitions aux enfants méchants. Le sapin était considéré comme une source de vie qui résiste aux froids de l’hiver. Le Père Noël a été inventé par un Américain en 1868 et dessiné par Thomas Nast pour Harper’s Magazine. Il est habillé en vert ou en rouge ? C’est Coca Cola qui a transformé en rouge et blanc adopté universellement de nos jours.

Hier le 22 décembre, quelques Cambodgiens de Montréal en profitent pour fêter Noël avec un Cambodgien, que nous désignons sous le nom de Sok, venant du Cambodge. Au cours de ce réveillon, nous avons demandé à notre compatriote de passage de répondre aux questions que nous avons posées au Parti Sam Rainsy, reproduites ci-dessous :

1/. Maintenant la ville de Siem Reap et une grande partie de nos provinces de l’Ouest utilise l’électricité venue de Thailande. Ainsi nos provinces de l’Ouest sont déjà dépendantes en énergie électrique de la Thailande. La Thailande ne possède-t-elle pas déjà un énorme moyen de pression sur le Cambodge ? Un pays dépendant en énergie électrique d’un pays étranger, peut-il être indépendant ? Existe-t-il dans le monde un pays développé donc indépendants politiques, dans ce cas ?

2/. La Banque Mondiale finance la construction des lignes électriques à haute tension en provenance du Vietnam pour alimenter en électricité nos provinces du Nord-Est et de l’Est en électricité. Dans ces conditions le Cambodge peut-il être indépendant du Vietnam ?

3/. Les Vietnamiens vont construire deux centrales hydroélectriques dans nos provinces du Nord-Est. N’est-il pas une autre dépendance insupportable vis à vis de notre voisin de l’Est ?

4/. Le Japon est en train d’aider le Vietnam à construire des autoroutes reliant nos provinces du Nord-Est à un port vietnamien de l’Est pour écouler nos richesses de cette région par un port vietnamien. Est-ce dans les intérêts nationaux cambodgiens ?

5/. Les USA envisagent de construire une autoroute avec trois voies dans chaque sens entre Prey Nokor et Phnom Penh, alors que nous avons besoin d’une telle autoroute entre Phnom Penh et Sihanoukville. Pourquoi cette nouvelle facilité aux colons vietnamiens accordée aux colons vietnamiens de venir encore plus nombreux au Cambodge ?

6/. Toutes ces constructions sont et seront faits avec des ingénieurs, techniciens et autres à 100 % non Cambodgiens. Cela n’explique-il pas que 300 000 diplômés cambodgiens sont toujours au chômage ?


Réponses :

Maintenant, avec la menace de couper l’électricité à Siem Reap Ville, la Thailande peut imposer sa volonté sur tout l’Ouest du Cambodge. Ainsi tout l’Ouest de notre pays est déjà soumis aux volontés de Bangkok. Par exemple, la Thailande s’oppose à la construction d’une bonne route pour permettre l’exploitation touristique de Preah Vihear à partir du côté cambodgien. Cette route est maintenant toujours peu praticable, malgré les promesses de Hun Sen. Il faut se rappeler que c’est la construction de cette route qui a valu à Chea Sophara de perdre son poste. Comme conséquence Preah Vihear se trouve déjà pratiquement en territoire thaï.

Toute notre province de Koh Kong y comprises nos îles côtières et au large, une grande partie de notre province de Battambang et la partie Ouest de notre province de Pursat situé à l’Ouest de la ville de Pursat sont déjà, en grande partie, intégrés économiquement et culturellement à la Thailande. Beaucoup de familles qui ont les moyens envoient leurs enfants faire leurs études en Thailande et apprennent la langue thaïe. Bientôt, avec la construction du chemin de fer Poipet – Sisophon, l’intégration de cette région à la Thailande sera encore plus forte. Alors, peut-être, nous aurons une bonne route entre Sisophon et Siem Reap Ville. Déjà à Poipet, Sok nous signale qu’il n’y a nulle part la moindre affiche en caractère cambodgienne. La construction du chemin de fer Battambang – Phnom Penh – Sihanoukville ne sera jamais réalisée.

Au sujet de la situation à l’Est, notre Cambodgien de passage nous dit que la situation est identique qu’à celle de l’Ouest. Le problème est de savoir où sera tracée la frontière entre la Thailande et le Vietnam. Il y a déjà une frontière maritime entre nos deux voisins, signée en août 1997. Il y a aussi des négociations entre le Vietnam et la Thailande pour se partager nos richesses en hydrocarbures. D’après Sok, il n’y aura jamais de raffinerie de pétrole au Cambodge, ni d’usines électriques utilisant notre gaz ou notre pétrole. Ce sont les sociétés vietnamiennes et thaïes qui s’approprieront nos ressources en hydrocarbures, les transformeront en électricité et nous revendront avec de gros bénéfices : bénéfices sur la vente de nos hydrocarbures, bénéfices sur la vente aux Cambodgiens de l’essence et de l’électricité, bénéfices dans l’utilisation de leurs entreprises, de leurs ingénieurs et de leurs techniciens. Les ingénieurs et techniciens cambodgiens formés en langues étrangères et majoritairement de bas niveau restent au chômage, à l’exception de quelques rares exceptions qui réussissent à aller faire leurs études dans des universités étrangères.

Sok nous fait remarquer aussi que notre riz produit à l’Ouest est vendu aux Thaïs et que notre riz à l’Est est vendu au Vietnam. Cette année ce sont deux millions de tonnes de riz cambodgiens vendus à nos deux voisins. Mais le riz cambodgien est destiné à la consommation intérieure chez nos voisins. Car le riz cambodgien est de meilleure qualité que le riz thaï et le riz vietnamien. Mais cela permet à ces deux pays d’exporter deux millions de tonnes de plus de riz thaï et vietnamien. Puis nos voisins nous revendrons des brisures de leurs riz.

Sok nous fait remarquer aussi que nos hommes politiques et les reporters des journaux au Cambodge, ne vont plus aller rendre visite à nos compatriotes à nos frontières, à l’Est comme à l’Ouest. Pourquoi ?

Conclusion :

Il est curieux et impensable que nos hommes politiques ignorent ces aspects de la politique de Hun Sen qui mène à la disparition de notre pays dans peu de temps. Ainsi les Cambodgiens de l’Ouest iront-ils partager le sort de nos frères vivant actuellement en Thailande et connus sous le nom de Cambodgiens de Surin ? Et à l’Est les Cambodgiens iront-ils partager leur sort avec les Cambodgiens du Kampuchea Krom ? Avec comme avenir, leur disparition totale comme les Chams, si les Cambodgiens se contentent de suivre aveuglément nos hommes politiques. Avons-nous déjà oublié la lettre de Sirik Matak ? Le sort des Hmongs ? Le sort de nos sœurs, frères et compatriotes du Kampuchea Krom qui s’étaient battus pour les Français, pour les Américains, pour les communistes vietnamiens et pour les Vietnamiens pro US ? Les intérêts des grandes puissances peuvent changer brusquement virer de 180 degrés. Par exemple les USA et Hanoi se faisaient la guerre, maintenant ils sont amis. Après la victoire de Hanoi, les Hmongs et les Cambodgiens du Kampuchea Krom qui se battaient pour les Américains, se faisaient massacrer par les communistes vietnamiens. Washington ferme les yeux. L’indépendance du Cambodge est-il dans l’intérêt des grandes puissances ?

Heureusement, au Cambodge, comme le montre Sok, nos compatriotes comprennent bien la situation, contrairement à l’aveuglement de nos hommes politiques. Ils savent, par exemple, que le dernier retranchement de notre nation se trouve dans notre culture dont l’écrit est la partie essentielle pour assurer la pérennité.

« Aksar Rolut, Cheat Roleay » est une sentence inoubliable léguée par nos ancêtres.

En terminant nous souhaitons bon courage et détermination à tous ceux qui travaillent dans des conditions très difficiles pour développer et diffuser les livres en notre langue.

Joyeux Noël à tous, avec une pensée particulière par les enfants pauvres cambodgiens qui, au mieux, arrivent à ramasser quelques restes de nourritures jetées par les riches.

Ci-dessous la lettre de Sirik Matak.

(13( ?) avril 1975)
Excellence et cher ami,
Je vous remercie très sincèrement pour votre lettre et pour votre offre de nous conduire vers la liberté. Hélas ! Je ne puis partir d'une manière aussi lâche.
Quant à vous et à votre grand pays, je n'aurais jamais cru un seul instant que vous abandonneriez un peuple qui a choisi la liberté. Vous nous avez refusé votre protection ; nous ne pouvons rien y faire. Vous partez et je souhaite que vous et votre pays trouviez le bonheur sous le ciel.
Mais, notez-le bien, si je meurs ici, dans mon pays que j'aime, tant pis, car nous sommes tous nés et nous devons mourir un jour. Je n'ai commis qu'une erreur, ce fut de vous croire et de croire mes Américains.
Veuillez accepter, Excellence, mon cher ami, mes sentiments loyaux et amicaux.
Sirik Matak.


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Le bouddhisme, la science et l'ethique

Nouvelles du Cambodge N° 0749-F

Le Bouddhisme, la Science et l’Ethique

Khemara Jati
Montréal, Québec
Le 20 décembre 2007

Nous publions ci-dessous un article sur une découverte scientifique très importante concernant la fabrication des cellules souches humaines à partir des cellules de la peau. Avant, les cellules souches se trouvent dans les embryons qu’il faut détruire. Ce qui pose un problème d’éthique. Car la question est de savoir quand commence la vie d’un être humain au point de vue éthique ? Pour le moment, pour satisfaire la liberté sexuelle des femmes, on affirme que la vie humaine commence un certain nombre de semaines après la conception. C’est pour permettre d’avorter légalement. Mais cela ne répond pas à la question posée plus haut, au point de vue conceptuel.

A cette question de savoir à quel moment commence la vie d’un être humain, que répond le bouddhisme ?

1/. Commençons par une histoire vécue.

Avant 1970, un Chauvay Srok (Chef de district), en tournée remarque un magnifique tronc de Beng (ébène) déraciné. Le lendemain il dépêche un tracteur pour le ramener à côté de chez lui. Le soir même il devient gravement malade. Le Hora (sorte de médium) consulté, lui dit que ce tronc de Beng est habité par un Neak Ta (un génie). Il faut donc le remettre en place et pour réparation, il faut faire des offrandes avec prières et repas des bonzes. Le lendemain, guéri, le Chauvay Srok organise comme promis les cérémonies en question. Au cours de la cérémonie, la tradition veut qu’il y ait un « Tès Krè Pi » ou « Tès Krè Bei » (un débat public à deux ou trois bonzes érudits sur le bouddhisme). Dans le cas présent c’est un débat entre deux bonzes érudits assis sur des deux sortes de plates-formes un peu surélevées par rapport à l’assistance. Un des bonzes est très connu pour son érudition.

Une des questions : L’organisation de cette cérémonie expiatoire est-elle conforme aux préceptes bouddhiques ?

Après débat, le bonze connu pour son érudition résume : la réponse est oui. Car le Chauvay Srok a promis d’organiser cette cérémonie, s’il est guéri. En le faisant, il ne fait que tenir sa promesse. Car pour un bouddhique, il n’y a pas de génie, mais il y a le respect de la parole donnée, même à soi-même. Ce qui est un des commandements du bouddhisme dans la vie de tous les jours. C’est une sorte d’éthique de vie

2/. Pour répondre à la question sur les cellules souches, rappelons quelques préceptes fondamentaux du bouddhisme :

A/. Pour le bouddhisme, tout évolue, rien n’est permanent. Cette proposition est maintenant acceptée par tous les scientifiques du monde. Elle se trouve dans toutes les sciences et énoncée pour les êtres vivants par Darwin. Même l’univers, dont la terre, est en constante évolution.

B/. Bouddha, avec les Grecs vers la même époque, ont inventé le raisonnement logique. La différence se trouve dans les domaines d’investigations. Les Grecs, héritiers des civilisations mésopotamiennes et égyptiennes, l’utilisent dans les mathématiques, la physique, la cosmologie et la philosophie. Bouddha l’utilise dans l’introspection et la méditation.

Bouddha plus ou moins explicitement émet les postulats suivants :

a/. Tout évolue, en toute chose la stabilité n’est qu’une apparence, chez l’homme, chez tous les êtres vivants comme également dans la nature elle-même. C’est la réalité de tous les jours, même pour la terre et pour l’univers.

b/. Le postulat de la métempsycose est plus controversé. Il faut rappeler qu’au temps de Bouddha, on ignorait l’existence des êtres vivants invisible à l’œil nu, comme les micro-organismes, les microbes, les virus. En plus Bouddha avait une longue vie et même très longue pour son époque. Ce postulat suppose l’existence de l’âme qui sera généralisée plus ou moins explicitement, dans toutes les autres religions du monde comme le christianisme et l’islam. Bouddha généralise cette notion aux animaux, à tous les êtres vivants, sauf aux plantes. Sans les fruits et légumes, il n’y a plus de nourriture possible.

A partir de ces postulats, Bouddha essaie de convaincre ses disciples. Bouddha n’impose jamais ses idées, mais les fait accepter par le raisonnement, la méditation et l’expérience, comme la souffrance dans la vie par exemple. Bouddha disait que si on voit un jour un homme voler dans les airs, c’est qu’il y a une explication rationnelle de ce fait. Chez Bouddha, il n’y a pas de surnaturel ni de génie tutélaire, ni d’inexplicable.

C/. En quelque sorte Bouddha invente la confrontation démocratique des idées au sein les communautés bouddhiques. Nous souhaitons

§ Que s’organisent, de nouveau, des « Tès Krè Pi » ou « Tès Krè Bei », traditionnels de discussions démocratiques entre deux ou trois bonzes érudits pour diffuser le vrai bouddhisme, avec possibilité des questions posées par l’assistance.

§ A l’image de ces discussions religieuses, il est souhaitable que des séminaires de ce genre se tiennent entre des spécialistes sur certaines périodes de notre histoire. Sujets proposés, non exhaustifs : « Les raisons de la supériorité d’Ayuthia sur Angkor », « Les points forts et les points faibles de la civilisation angkorienne » ou « Les conséquences de l’arrivée des Portugais suivis des autres Européens en Asie », etc.

La démocratie, commence d’abord par la démocratie dans les débats libres et démocratiques dans des séances de « Tès Krè Pi ou Krè Bei » entre bonzes érudits. C’est une véritable leçon de débats démocratiques qui peuvent déboucher sur des séminaires entre historiens et non organisés pour écouter un seul « spécialiste » aussi connu soit-il.

Dans l’histoire relatée ci-dessus, la réponse des érudits du bouddhisme, répond parfaitement aux préceptes de Bouddha : il n’y a ni génie tutélaire, ni autres phénomènes surnaturels, mais il est question de la parole tenue envers soi-même, et aussi envers autrui (nityam). C’est une sorte d’éthique de vie d’un vrai bouddhique.

Mais petit à petit, à cause de l’ignorance, le bouddhisme est devenu, pour beaucoup, une religion abstraite où Bouddha devient un dieu tout puissant comme les autres religions, avec paradis et enfer.

3/. Ainsi pour le bouddhisme tout être vivant commence dès la conception et même avant. Car, pour qu’il y ait naissance, il faut une volonté de l’âme à naître. Donc l’éthique bouddhique rejoint l’éthique chrétienne : l’être humain commence au moins dès la conception. Ainsi l’avortement est un crime, mais il répond aux besoins de la liberté sexuelle des femmes. C’est un problème de société. Il ne relève plus de l’éthique bouddhique.

Il est difficile de répondre à une autre question importante : quand un être humain est-t-il considéré comme mort ? Avec les progrès de la science, on peut maintenir en vie végétative presque indéfiniment un corps, dans certain cas. Certains humains, dans le coma depuis des années, finissent par se réveiller. Avant, la mort c’était l’arrêt du cœur, maintenant, c’est l’arrêt du fonctionnement du cerveau. L’avenir nous réservera-t-il d’autres définitions ? Avec la greffe du cerveau ?

De nos jours, les êtres humains peuvent vivre de plus en plus longtemps tout en restant relativement jeune mentalement et physiquement. L’architecte brésilien, mondialement connu, Oscar Niemeyer, celui qui a construit la capitale nouvelle Brasilia de son pays, vient de fêter ses cent ans le 15 décembre 2007, il mène toujours une vie professionnelle active et continue toujours de construire, notamment en Espagne. Rappelons qu’il y a 2 000 ans, la durée moyenne de vie des Normands était de 35 ans. Ramsès II et Jayavarman VII qui vivaient jusqu’à plus de 90 ans étaient des exceptions qui confirment la règle.

Dans les pays développés, on pense que la moitié des enfants nés actuellement vivront au moins cent ans. Au Cambodge ?

Dans l’avenir, certains scientifiques pensent qu’il est possible d’enfanter dans des utérus artificiels. Comment répondront l’éthique, et les diverses religions ? De toute façon dans un avenir prévisible il n’est pas possible de créer la vie à partir de la matière inerte. Pour élever des enfants dans des utérus artificiels, il faut au moins au départ des cellules venant d’une femme et d’un homme.

Depuis sa naissance, il y a 2 500 ans, il n’y a jamais eu de bouddhistes intégristes. Il faut noter aussi que le bouddhisme gagne du terrain chez les intellectuels en Europe et en Amérique du Nord.

Ci-dessous l’article concernant la possibilité de produire des cellules souches à partir des cellules de la peau et non à partir d’un embryon humain. Ainsi l’éthique est respectée.

Khemara Jati

Annexe :
Avancée scientifique majeure dans les cellules souches

CHICAGO (AFP) 21/11/2007 06:50

Des scientifiques ont obtenu une avancée majeure en réussissant à transformer des cellules de peau humaine en cellules souches, ouvrant la voie à de nouveaux traitements contre le cancer, le diabète ou encore la maladie d'Alzheimer, selon deux études publiées mardi.

Cette découverte simultanée par une équipe japonaise et une équipe américaine permet en outre d'obtenir des cellules souches sans passer par la destruction d'embryons, ce qui permet de contourner le débat éthique sur la question.

La Maison Blanche a salué cette découverte, y voyant le moyen de résoudre des problèmes médicaux « sans compromettre ni le but élevé de la science, ni le caractère sacré de la vie humaine ».

Le Vatican condamne fermement toute manipulation sur l'embryon humain mais encourage la recherche scientifique sur les cellules souches adultes.

Photo fournie par l'université du Wisconsin montrant une clellule de la peau modifiée génétiquement©AFP/University of Wisconsin Junying Yu

La Conférence des évêques des Etats-Unis a estimé mardi que cette nouvelle découverte « nous rappelle une fois de plus que les progrès médicaux et le respect de la vie humaine ne sont pas en conflit. Ils peuvent et doivent se soutenir et s'enrichir mutuellement pour le bien de tous ».

Cela « va complètement changer le champ » des recherches, estime James Thomson, l'auteur de l'étude américaine publiée par l'édition en ligne du magazine Science.

Les cellules souches sont considérées comme une possible panacée face à certaines des maladies les plus mortelles ou handicapantes, car elles peuvent évoluer en cellules de 220 types différents.

Junying Yu, membre de l'équipe de l'Université du Wisconsin qui a participé à l'étude sur les cellules souches, le 19 novembre 2007©AFP/University of Wisconsin Bryce Richter

En permettant aux scientifiques d'y avoir plus facilement accès, la découverte annoncée mardi devrait ainsi permettre de faire avancer rapidement la recherche pour le traitement du cancer, des maladies d'Alzheimer et de Parkinson, du diabète, de l'arthrite, des lésions de la moelle épinière, des attaques, des brûlures et des maladies cardiaques.

Cette nouvelle technique peut en effet être reproduite de manière relativement simple par des laboratoires standard, a expliqué lors d'une conférence téléphonique M. Thomson, de l'université du Wisconsin à Madison (nord), déjà pionnière dans l'obtention de cellules souches en 1998.

« Mon optimisme est monté en flèche sur mon baromètre personnel », a-t-il dit, prédisant que le financement des recherches, jusqu'ici entravé par le débat éthique, « va enfin augmenter ».

Ce travail « est monumental par son importance dans le champ de la recherche sur les cellules souches et par son impact potentiel sur notre capacité à accélérer les applications de cette technologie », a commenté Deepak Srivastava, directeur de l'Institut Gladstone sur les maladies cardiovasculaires.

Les deux équipes ont réussi à transformer les cellules de peau en cellules souches en y insérant quatre gènes différents au moyen d'un rétrovirus.

L'équipe japonaise, conduite par Shinya Yamanaka de l'université de Kyoto, réussit à créer une lignée de cellules souches à partir de 5.000 cellules. Son étude paraîtra le 30 novembre dans le magazine Cell.

« Cette efficacité peut paraître très faible, mais cela signifie qu'à partir d'un seul échantillon de 10 centimètres, on peut obtenir de multiples lignées de cellules souches pluripotentes (induced pluripotent stem cells, iPS) », a-t-il expliqué.

L'équipe de James Thomson réussit à reprogrammer une cellule sur 10.000, mais sans le recours à un gène cancérigène.

Les deux techniques ont pour avantage de permettre de créer des cellules souches ayant le code génétique du patient, éliminant ainsi les risques de rejet. Mais elles présentent des risques de mutation, car les cellules conservent une copie du virus utilisé.

La prochaine étape-clé, selon Science, sera de réussir à se passer de rétrovirus.

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Yash Ghai à Hun Sen

Yash Ghai to Hun Sen:
One cannot hide a dead elephant with a basket
UNITED NATIONS
Cambodia Office of the HighCommissioner for Human Rights
Special Representative of the Secretary-General for human rights in Cambodia
PRESS RELEASE
Phnom Penh 17 December 2007:
The Special Representative of the United Nations Secretary General for Human Rights in Cambodia is issuing today the following clarification.
“The Special Representative is an independent expert appointed by the Secretary General of the United Nations. His mandate is to monitor the respect for human rights and fundamental freedoms in the country, to help the Government and the Cambodian people in ensuring that the Cambodian laws and the standards accepted by the State are effectively observed, foster international cooperation in the field of human rights, and report annually to the newly established United Nations Human Rights Council.

As Special Representative, he is not an employee of the United Nations and does not receive a salary. His work is pro bono. Mr. Yash Ghai is a professor of constitutional law and a human rights defender, with a lifelong experience in promoting rule of the law in many countries. He does not represent Kenya. He represents the human rights principles enshrined in the Charter of the United Nations, of which Cambodia is a Member State, the Universal Declaration of Human Rights and the International Human Rights treaties, several of which have been ratified by Cambodia, and are part of Cambodian law.

The Special Representative does not intend to dialogue with the Government through the media. He has sought meetings with several ministers well in advance of his visit. They either did not respond or refused to meet him. In the absence of such meetings, he has described publicly his main concerns as he is duty bound to do. These concerns will be addressed in detail in his forthcoming report. He hopes that the Government will respond to the substance of his assessment. He is ready to discuss it in detail, and will listen to the views of the Government at any time. The door of dialogue must always remain open. To have dialogue one must have interlocutors and the Special representative will pursue his efforts in this direction.

An honest scrutiny of the reports of the Special Representatives since 1993, shows that progress in the area of the rule of the law and the administration of justice, where they occurred, were duly reported, as any fair assessment requires. At the same time, matters of concern, such as those reported during previous visits, have continued to be highlighted. These are serious concerns for the lives of many Cambodians. These issues will not go away. They deserve attention. As a Cambodian proverb goes, one cannot hide a dead elephant with a basket. The role of the Special Representative is to understand these concerns, to draw the Government's attention to them, and work with it, with the Cambodian people and the international community to address them.

Lastly, it is important to clarify that the Special Representative has not called for the international community to cut its support to Cambodia. Rather, he has encouraged Member States, as bound by the Charter of the United Nations, to pursue their assistance efforts, while playing a more critical role in recognising human rights realities in Cambodia, the understanding of which the Special Representative mandate aims at contributing.”

End of statement.

Le soutien à Yash Ghai

19/12/2007
CAMBODGE / ONU

CINQ GRANDES ORGANISATIONS DE DÉFENSE DES DROITS HUMAINS APPORTENT LEUR SOUTIEN AU REPRÉSENTANT DES NATIONS UNIES

Version English

Cinq grandes organisations de défense des droits de l’Homme ont appelé aujourd’hui le gouvernement cambodgien à respecter ses obligations internationales dans le domaine des droits humains, ainsi que les responsables des Nations Unies en charge de vérifier leur respect.

Les cinq organisations – Human Rights Watch, Asian Human Rights Commission (AHRC), Asian Forum for Human Rights and Development (FORUM-ASIA), la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), et l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) – ont exprimé leur profonde préoccupation face au refus persistant du gouvernement cambodgien de dialoguer avec le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies sur les droits de l’Homme au Cambodge, le Professeur Yash Ghai.

Le 12 décembre, en réaction à des critiques exprimées par le Représentant spécial au terme d’une mission de 10 jours au Cambodge, le Premier ministre cambodgien Hun Sen a qualifié Ghai – un professeur de droit constitutionnel au Kenya qui est Représentant spécial depuis 2005 – de “touriste des droits de l’Homme” et a juré de ne jamais le rencontrer.

Le 10 décembre, lors de la conférence de presse clôturant sa mission, Ghai s’est dit préoccupé par le fait que le gouvernement, justifie au nom du “développement” les nombreuses saisies illégales de terres et les évictions forcées des personnes défavorisées dans les villes et les campagnes. Il a souligné que les communautés expulsées de leurs terres ne bénéficient pas de recours judiciaires efficaces et ne sont pas protégées de manière adéquate par la loi en raison de la corruption qui mine le système judiciaire et de l’application ineffective de la loi sur la terre. Ghai a également noté que les victimes finissent de plus en plus souvent en prison pour avoir tenté de defendre leurs terres et leurs droits (Voir ce document).

“Le Professeur Ghai a attiré l’attention sur des questions graves qui suscitent la préoccupation de l’ensemble de la communauté internationale active dans le domaine des droits humains,” a déclaré Basil Fernando, Directeur exécutif de AHRC, dont le siège se trouve à Hong Kong. “Il est inutile de nier les faits. L’expropriation des pauvres de leurs terres atteint des niveaux effrayants, les tribunaux sont politisés et corrompus, et l’impunité pour les auteurs de violations des droits de l’Homme reste la règle.”

Des responsables gouvernementaux ont accusé le représentant des Nations Unies d’inciter les Cambodgiens à s’opposer au gouvernement et ont qualifié d’ “inexacte” et dépréciative l’évaluation par Ghai de la situation des droits au Cambodge.

“Yash Ghai n’est pas un contestataire isolé. Toutes ses conclusions ont déjà été évoquées à de nombreuses reprises dans le passé par les ONG locales et internationales de défense des droits de l’Homme, les agences des Nations Unies, et les bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux”, a déclaré Sara Colm, Chercheuse senior pour Human Rights Watch, dont le siège est à New York. “Les bailleurs de fonds qui engagent des millions de dollars chaque année pour l’éradication de la pauvreté, la réforme judiciaire et le développement économique au Cambodge ne devraient pas favoriser les politiques gouvernementales qui ont pour effet de priver des milliers de Cambodgiens de leur logement, de leur source de revenu, et parfois même de leur vie.”

Le 11 décembre, un porte-parole du Ministère des Affaires étrangères a déclaré à la presse que les responsables gouvernementaux n’avaient pas pu rencontrer Ghai lors de sa visite car ils étaient “occupés à développer le pays.”

Dans la province de Ratanakiri, l’armée et la police ont tenté de mettre un terme à une réunion entre Ghai et des villageois autochtones dont la terre a été confisquée, prétendant que Ghai n’avait pas le droit de rencontrer des villageois car il n’avait pas reçu d’autorisation écrite des autorités locales. Les termes de référence de Ghai l’autorisent à voyager librement au Cambodge et à visiter des prisons sans autorisation préalable.

“Quand des soldats, l’arme au poing, menacent un responsable des Nations Unies, on n’ose imaginer combien il est difficile pour des paysans sans ressources de faire valoir leurs droits,” a dit Eric Sottas, Directeur de l’Organisation mondiale contre la torture, basée à Genève.

“Les défenseurs des droits économiques et sociaux au Cambodge sont également très exposés, particulièrement quand ils défendent les victimes d’évictions forcées,” a ajouté Souhayr Belhassen, Présidente de la FIDH, dont le siège est à Paris.

Le 12 décembre, dans un discours prononcé en public, Hun Sen a déclaré que les missions de Ghai au Cambodge ne font que “provoquer des problèmes” et lui a reproché de ne pas se concentrer sur les difficultés du Kenya, où la situation est, a-t-il dit, “cent fois pire” qu’au Cambodge. Hun Sen a également critiqué les mécanismes des Nations Unies dans le domaine des droits de l’Homme, exhortant les Nations Unies à cesser de produire des rapports critiques sur la Birmanie ; il a ajouté que le Cambodge défendrait la Birmanie au sein du Conseil des droits de l’Homme des Nations unies, ce qui fait de lui le premier leader au monde à avoir exprimé son soutien à la répression récente exercée par le gouvernement birman (Voir ce document).

“Les attaques de Hun Sen contre le Professeur Ghai sont scandaleuses, d’autant que le premier ministre n’a pas remis en cause la véracité des conclusions de Ghai,” a dit Anselmo Lee, Directeur exécutif de FORUM-ASIA, dont le siège est à Bangkok. “Les déclarations de Hun Sen démontrent son mépris, non seulement pour les Nations Unies, mais aussi pour le mouvement démocratique birman.”

Les Accords de Paris de 1991 prévoient que le Secrétaire général des Nations Unies nomme un Représentant spécial pour suivre la situation des droits de l’Homme au Cambodge. En tant que partie à ces accords de paix et à de nombreux traités internationaux de protection des droits humains, le Cambodge s’est engagé à respecter et protéger les droits de sa population (voir anglais ou Khmer).

“Les tirades de Hun Sen contre les Nations Unies sont le dernier épisode d’une longue série d’attaques et d’une absence de coopération avec Ghai et les trois représentants spéciaux des Nations unies qui l’ont précédé,” a déclaré Fernando. “Plutôt que rejeter publiquement les Nations Unies, le gouvernement cambodgien devrait rencontrer Yash Ghai et commencer à travailler à la mise en œuvre effective des recommandations incluses dans son rapport.”

Pour plus d’informations, veuillez contacter :
À Washington, DC, Sophie Richardson (Human Rights Watch) : +1-202-612-4341 ; ou +1-917-721-7473 (portable)
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À Genève, Eric Sottas (OMCT) : +41-22-809-49-39

Tiré de : http://www.fidh.org/spip.php?article4363

Publié par Khemara Jati
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2007-12-24

Ponchaud : Compte rendu de Mission au Cambodge

Nouvelles du Cambodge N° 0748-F (suite)

COMPTE RENDU DE MISSION AU CAMBODGE
du 16 au 27 septembre 1990


Je me suis rendu au Cambodge à la demande du BPAC, officiellement invité par la Caritas Internationalis pour visiter ses projets

Déjà en 1982 j'avais fait des démarches pour me rendre au Cambodge par l’intermédiaire de l'UNICEF: le gouvernement cambodgien m'avait accordé un visa, mais les autorités de Hanoi me l'avaient retiré. Une seconde démarche effectuée en 1982 était restée sans réponse.

J'ai pu me déplacer à pieds, en moto, en voiture, en toute liberté ; j'ai pu m'entretenir avec qui j'ai voulu, sans avoir l'impression d'être surveillé. J'al passé la plus grande partie de mon temps à Phnom Penh, mais je suis allé à Moat Krasas (15 km au sud-est), à Kompong Chhnang (90km au nord), à Kompong Speu (50 km à l'ouest).

Impression d’ensemble

Venant d'Ho Chi Minh-ville, on n'est guère dépaysé en arrivant à Phnom Penh : une ville également délabrée, sale, défigurée. On ne voit pratiquement pas de ruines, mais la plupart des maisons sont noircies par les pluies de la mousson, beaucoup d'immeubles d'habitations n'ont plus de fenêtres ni de portes, elles ont été remplacées par des cartons, des tôles. A part les grandes artères les rues n'ont pas été entretenues et sont souvent défoncées, boueuses, remplies de flaques d'eau, en cette fin de saison des pluies; la plupart des trottoirs sont cassés, des ordures traînent en dépit d'un service de voirie important armé de balais et même doté récemment de bennes « Propreté de Paris » encore immatriculées 75; des herbes folles poussent un peu partout: le Véal Men (terrain des grands rassemblements populaires, du Congrès, etc.) ressemble à une décharge publique; même le "Phnom", au centre de la ville n'est pas très bien entretenu, bien que l'extérieur de sa pagode et le stupa qui le surmontent aient été réparés.

Quelques quartiers cependant sont propres, apparemment destinés à être visités par des étrangers: celui du « monument de la Victoire » (jadis « monument de l'Indépendance »), avec ses beaux parterres, celui du Palais royal, le Cambodiana avec ses 250 chambres luxueuses et ses motels, la berge du Mékong, en face du palais royal. Un certain nombre de cocotiers plantés par Pol Pot donnent à la ville un aspect encore plus exotique qu'autrefois.

Phnom Penh apparaît comme une ville surpeuplée, avec de nombreux squatters qui ont occupé les appartements vides, campent dans des baraques de bambous à l'intérieur des enceintes de pagodes, ou dorment sur les trottoirs. C'est une ville animée, avec une intense circulation de cyclos, de vélos, de motos : le jour du Pchoum Ben, la grande Fête des défunts, le 19 septembre, les motos circulaient sur plusieurs rangs, en file ininterrompue dans les principaux axes de la ville. Quelques voitures se frayaient un chemin en claxonnant sans arrêt. La circulation y est très anarchique, des agents essayent avec peine d'y mettre un peu d'ordre.

Phnom Penh frappe par le nombre de ses marchés assez bien achalandés, où les foules se pressent, mais aussi par la multitude de ses boutiques de pièces de récupération en tous genres, de petits marchands de détail, vendant quelques fruits, des cigarettes à l'unité, de l'essence au litre assis au bord des trottoirs.

Au premier regard, on a l'impression d'un peuple à la fois semblable et très différent de celui qui peuplait la ville avant 1975: moins de Chinois (ceux-ci ont progressivement racheté le centre de la ville et ses boutiques), davantage de Khmers et surtout de Vietnamiens. Les
Khmers semblent très pauvres, ce sont des paysans venus gagner leur vie à Phnom Penh ou qui ont fui les combats. L'accent des Phnom Penhois n'est plus celui de jadis.

Pendant ces dix jours, j'ai pu noter une trentaine de mots ou d'expressions nouvelles, ou du moins d'usage généralisé dans le peuple, fruits directs de la révolution culturelle de Pol Pot : « hôp » pour « manger »; « tveu chivapéap », « gagner sa vie » (avec les harmoniques: « khméan chéavaphéap); « saphéapkar », « situation »; « niyéay kampuchéaw », « parler khmer »; « aharathan », « cantine »; « téarokathan », « crèche »; « métreysala », « école maternelle »: « prachéachon », « peuple »; « kal pi sangkum », « sous les régimes précédents »; « sappada », « semaine »; « komret vapathor », « niveau culturel »; « krousar », « conjoint »: « saum aèkaphéap », « être d'accord »; « avathaméan », « absence »; « vathaméan », « présence »; « tveu satésanéam », « raconter sa biographie »; « samasaphéap », « nombre des participants »,etc. .

Le nom des rues porte le signe des changements politiques: l'ancien bld Monivong (devenu « Pratichépatai », « démocratie » sous Lon Nol), est rebaptisé « Son Ngoc Minh », un
partisan du Vietminh dans la guerre de libération contre les Français; l'ex-bld Norodom (devenu ensuite celui « du 9 octobre ») porte le nom de « Tou Samuth », fondateur du Parti communiste cambodgien; le bld Sihanouk est devenu « Sivotha », frère cadet du roi Norodom qui s'était révolté contre lui en1860; le bld Kampuchéa Krom s'appelle « Amitié Kampuchéa-Vietnam »; le bld Mao Tsé Toung est devenu « Kéo Moni », du nom d'un député communiste khmer de la fin des années cinquante; la route de l'amitié Khméro-soviétique est devenue « de l'Union Soviétique »; l'allée Kossomak, dédié au souvenir de la Reine-mère a été rebaptisée « Ho Chi Minh »; le bld devant Chamkar Mon s'appelle « Achar Sva », instigateur de la première révolte anti-française de 1864; le quai Sisowath est devenu « bld Lénine »; la route qui passe devant le front du Bassac est devenue « Karl Marx ». La rue Trasak Paem a gardé son nom, car le jardinier qui portait ce nom avait, à la fin du XllIè siècle, renversé la monarchie khmère. Par contre les petites rues transversales entre les grands boulevards portent des N°, à l'américaine. Les hôpitaux portent généralement le nom des grandes dates de la révolution cambodgienne: « De la Révolution » (Calmette), « du 17 avril » (Hôpital des bonzes), « du 2 décembre » (Ang Duong). etc.

La description pourrait être dressée sur Kompong Chhnang: une ville laissée à l’abandon, des herbes folles poussant partout, un troupeau de chevaux broutant l’herbe sur la principale place de la ville, les beaux bâtiments de la capitale provinciale laissée à l'abandon. En revanche, de nouveaux monuments ornent la ville, comme toutes les capitales provinciales: un « monument de la victoire », réplique, de celui de Phnom Penh ainsi qu'un monument célébrant l’amitié indéfectible entre le Cambodge et le Vietnam.

De Kompong Speu, il ne reste plus rien, sinon quelques ruines bordant une route asphaltée: les habitations ont été rasées par les bombardements, avant même 1975. Une nouvelle ville s'est reconstruite le long de la route nationale N° 4 menant au port de Kompong Som, avec de superbes bâtiments de l’école des cadres du Parti.

Dans les campagnes, la vie semble avoir repris comme avant. De-ci de-là des ruines qui dressent vers le ciel les piliers en béton de ce qui fut des maisons. Dans les bourgs, la grande majorité des belles maisons en bois ont disparu sans laisser de traces. En allant sur Kompong Chhnang on peut voir quelques canaux rectilignes, bordés de digues, creusé sous Pol Pot, mais que les paysans ont repiqués en riz, car ils semblent inutiles à l'acheminement de l'eau. Selon des voyageurs, la région de Svay Rieng serait particulièrement déserte.

La tragédie vécue sous Pol Pot est partout présente: non seulement au musée de l'horreur
à Tuol Sleng ou aux charniers de Choeung Aek (où ont été torturés et exécutés des cadres du Parti), mais aussi à la pagode Vat Ampè Phnom de Kompong Speu où des milliers de Phnom Penhois ont été massacrés, au Phnom Sampeuou près de Battambang transformé lui aussi en musée de l'horreur. II suffit de s'arrêter et de parler quelques instants avec des inconnus pour entendre le récit de souffrances inouies: la vieille Phoeung a perdu 12 de ses quatorze enfants; rentrant à pieds de Préah Net Préah (près de Battambang) pour y retrouver sa parenté, elle apprend que tous ont été tués; elle se rend chez elle: sa maison est occupée par des soldats vietnamiens: "Je suis descendue dans la rue, j'ai crié comme une folle... Maintenant j'offre tout cela avec le Christ en croix. » Une autre chrétienne a vu tuer ses parents devant elle, sa sœur a vécu plusieurs jours, enfermée dans une jarre pour échapper aux Khmers rouges. Une autre femme vendant des fruits à Chrui Chanvar, près de l'ancien Carmel: elle avait 13 enfants, cinq de ses garçons ont été tués ainsi que son mari et un gendre... Avec un sourire triste, les Khmers parlent de ces morts comme d'une chose presque banale: "Pol Pot m'en a mangé tant (en khmer: (« si »).

La Révolution semble avoir eu deux petits aspects positifs: les réunions commencent à l'heure, chacun apporte un carnet sur lequel sont notées les choses importantes.

Situation militaire

Il est difficile à Phnom Penh, à Kompong Chhnang ou à Kompong Speu de s'imaginer être dans un pays en guerre: aucun coup de feu, aucun bruit de canon. Seul le couvre-feu de 21 heures à 5 heures du matin et la présence de quelques mutilés sont le signe de cette dure réalité. Cependant le climat de guerre est lourd, même s'il n'est pas directement perceptible à l'étranger de passage. Les jeunes hommes sont peu nombreux: seuls échappent à la conscription ceux qui font des études, les pauvres sont raflés et partent au front après quelques jours de formation militaire. Si les mutilés sont peu visibles en ville, c'est qu'ils en ont été écartés, et qu'ils vivent: dans des zones reculées, comme Siemréap, pratiquement à l'abandon. On avance des chiffres de plus de 1000 nouveaux mutilés par mois, principalement à cause dés mines.

En parlant avec les pauvres, on apprend que le fils de telle ou telle veuve s'est fait tuer, il y a une quinzaine de jours à Svay Chek. A Kompong Speu, un groupe de paysannes de Samrong Thon et de Krong venues au marché font état de l'interdiction faites par les Khmers rouges d'aller dans les rizières proches de la montage qui borde la ville à l'ouest, car ils ont miné ces rizières ; les boeufs qui n'avaient pas compris l'interdiction ont sauté sur les mines. Une autre paysanne fait partie des quelques dizaines de milliers de personnes déplacées par le régime afin de nettoyer la chaîne des Cardamones de la présence des Khmers rouges. Un jeune homme dit que les soldats gouvernementaux aidés de "nos amis" (vietnamiens) sont en train de pourchasser les Khmers rouges. Il y aurait ainsi près de 155.000 réfugiés de l'intérieur, notamment dans les provinces de Banteay Méan Chhey, Kompong Chhnang, Kompong Thom. Par ces déplacements, le gouvernement voudrait non seulement priver les Khmers rouges de leur population, mais récupérer également de bulletins de vote, dans le cadre d'éventuelles élections. Le gouvernement voudrait que les ONG aident ces réfugiés, mais plusieurs sont réticentes, pour des raisons politiques.

Les Khmers rouges ne semblent plus lancer de grandes attaques, mais, dit-on, se réorganiseraient et encadreraient la population, y compris à Phnom Penh.

S'il est pratiquement sans danger de se déplacer dans la région de Phnom Penh, Takéo,
Svay Rieng, Prey Veng, Kompong Chhnang, Kompong Cham, si les chaloupes remontent le Mékong jusqu'à Kratié, apparemment sans encombre, en revanche, la route de Kompong Thom à Siemréap est coupée, le voyage vers Battambang ou vers Kampot est plus périlleux: récemment deux trains se dirigeant vers ces deux villes ont été attaqués par les Khmers rouges; un voyageur venu de Battambang par la route a vu un cadavre au bord du chemin; un autre venant de Chomnom, au sud-ouest de Battambang dit qu'il dort tous les soirs dans une tranchée: en effet les Khmers rouges campent à 5 km seulement et ils n'hésitent pas à piller les villages des environs: les villages qui leur résistent sont brûlés, ceux qui acceptent de leur donner du riz, des bœufs, de l'argent, des radios sont épargnés. Les Khmers rouges revendent tout cela en Thaïlande

Une économie de guerre

40 % du budget national (chiffre difficilement vérifiable en l'absence de véritables structures d’Etat) serait affecté à la guerre. Si le Cambodge semble avoir atteint l'autosuffisance alimentaire, malgré les aléas de la météorologie, il semble impossible à l'Etat de se lancer dans la réalisation de projets importants de reconstruction. Pourtant depuis dix ans, un certain nombre de nouveaux édifices sont sortis de terre: des dispensaires, des infirmeries, des écoles du Parti. Depuis un an, les pays de l'Est utilisent leurs deniers pour leur propre reconstruc­tion nationale et se sont désengagés du Cambodge: les caisses de l'Etat sont donc vides. Après une augmentation de 600 %, il y a quelques mois, les salaires des fonctionnaires se situent aux environ de 3.500 riels, mais ne suivent pas le cours de l'inflation (ce salaire est toutefois accompagné de fournitures en nature : riz, tissus, cigarettes, etc., ce qui amortit le choc de l'inflation). Le dollar s'échangeait à 660 riels le 27.9.90 (contre 560 quinze jours plus tôt). Le franc français vaut 105 riels), les prix s'envolent: l'essence (soviétique) qui se vend officiellement 130 riels (contre 50 il y a un mois) aux pompes officielles (distribution d'un litre par moto et 5 litres par voiture), se vendait entre 300 et 350 sur le trottoir lors du Pchum Ben (19.9.90). Cela n'empêche pas cependant les dizaines de milliers de motos de rouler comme si de rien n'était. Les motos se vendent entre 200 et 1500 $ selon leur état, une bicyclette aux environ de 100 $. Le dollar ou l'or sont les monnaies d'échange pour les gros achats, car le riel ne vaut rien. On peut voir dans les divers marchés, et notamment au marché central, de très nombreuses boutiques vendre des objets en or, avec des balances de haute précision pour peser l'or, etc. Les ménagères, par contre se rendent au marché avec des liasses impressionnantes de billets (les coupures sont de 5, 10, 20, 50, et récemment de 100 riels). Le riz vaut entre 85 (dernier choix) à 180 riels, le kilo de poisson vaut 400 riels, la viande de porc entre 600 et 700, celle de boeuf environ 500; une main de banane entre 150 à 300 selon les variétés; le sucre de palme 150 riels le kilo, le sucre de canne entre 250 et 350... Il faut environ 500 riels (4,5 FF) par jour pour une famille de trois personnes.

En dépit des salaires de misère des employés de l'Etat, on constate une importante économie souterraine échappant à tout contrôle. La corruption des fonctionnaires n'a jamais connu ces proportions, même sous les régimes de Sihanouk et de Lon Nol. Pour obtenir un diplôme de médecin, il faut donner une Toyota; pour avoir droit de faire nettoyer un bureau, une ONG a dû donner 1000 $ directement au ministre (qui en réclamait 2.000). Pour se rendre en voiture de Phnom Penh à Battambang, en juin, un étranger a dû payer à tous les postes de contrôle, en riels ou en cigarettes. Plusieurs attentats attribués aux Khmers rouges sont le fait de soldats gouvernementaux qui tirent sur les passagers qui ne paient pas un pourboire à leur passage. Alors qu'autrefois les fonctionnaires khmers observaient une certaine pudeur, du moins avec les étrangers. Actuellement ils n'hésitent pas à demander directement.

Les ONG sont les principales pourvoyeuses de fonds de cette économie souterraine: de très nombreuses infirmeries et dispensaires ont été construites un peu partout, mais ne fonctionnent pas, les médicaments étant vendus par les infirmiers et médecins. Même l'hôpital Calmette qui compte 20 médecins n'a pas de médicaments pour les pauvres. Alors que la pharmacie est pleine, mais pour l'usage des ministres et pour alimenter les fonds commerciaux du personnel. Jamais il y a eu autant de « classes » de malades à Calmette et dans les hôpitaux. Le règlement affiché devant la porte stipule qu'un cadre ou un employé de l'Etat doit passer en priorité. A Kampot, une association étrangère parrainait 140 orphelins: lors d'une visite inopinée, on n'en a trouvé que 4. Le lendemain les autorités réussirent à rassembler une vingtaine d'enfants... En d'autres endroits on loue les vêtements pour habiller les enfants en orphelins. (On a connu des choses semblables au temps de Sihanouk !).

La corruption généralisée n'est même plus objet de sanctions ni de remarques. « Jadis, dit une personne chargée par le Parti de noter les fautes des employés, tous s'efforçaient de suivre la loi du régime. Maintenant, nous qui ne voulons pas verser dans la corruption, nous passons pour des idiots, des ignorants. Je ne mange pas de la très bonne nourriture, c'est vrai, mais je suis heureuse dans, mon coeur. On m'accuse d’être pauvre, de ne pas savoir me "débrouiller", que mon karma est mauvais parce que j'élève un cochon à la maison pour améliorer mon ordinaire alors que les autres détournent des fonds publics. Jadis il fallait cacher sa richesse. Maintenant, depuis les lois de libéralisation de l'année dernière, chacun expose tout ce qu'il a, achète des voitures, construit des maisons. » Effectivement, on est frappé à Phnom Penh et dans ses environs du nombre de maisons en construction ou en rénovation: signe d'optimisme en l'avenir ? Préparation de la venue du personnel de l'ONU ? Ces constructions avaient pratiquement stoppé en mai, lors du durcissement politique du gouvernement. Rarement l'écart entre les riches et les pauvres ne semble avoir été aussi grand.

Situation politique

Il est difficile à l’intérieur de Phnom Penh d’évaluer la situation politique. C’est plus par des déclarations faites par les divers responsables à l’extérieur que l’on peut s’en faire une idée.

Il est certain que la plupart des personnes rencontrées semblent apprécier le vent de libération qui souffle sur le pays depuis environ un an, même si bien des aspects sont négatifs. Mais le régime reste policier et le Parti garde le monopole de toutes les activités politiques, relié par le Front comme organe exécutif de ses directives. On doit déclarer les nouveaux arrivants au chef de quartier, la surveillance est réelle, mais discrète. Un quart d’heure après mon arrivée chez un pasteur protestant qui avait eu des ennuis « avec la police », deux employés du quartier sont venus voir ce que je venais faire. Les réunions politiques sont moins fréquentes que par le passé.

Les prisons existent: non seulement T3, (la prison centrale Phnom Penh), mais également des prisons souterraines, dont celle de Tuol Sleng (à côté du musée de l'horreur du génocide khmer rouge), que l'on ne visite pas. Selon le directeur du Comité de la Croix Rouge Internationale, il serait possible que cet organisme puisse bientôt s'informer du sort des prisonniers. J'ai rencontré trois réfugiés qui sont rentrés des camps de Thaïlande: l'un est rentré de lui-même en 1982, mais il est surveillé par la police pour des raisons confessionnelles; un autre est rentré de lui-même comme « égaré » (« vongveng phleuv »): il n'a pu s'installer dans la ville même de Phnom Penh, mais dans un quartier périphérique et ne semble pas inquiété; le troisième est rentré par le biais de la Croix Rouge Internationale et n'est pas inquiété. Les "égarés", même d'anciens chefs khmers rouges, ont été réintégrés dans la société khmère, et portent une carte spéciale d’« égarés ». Ils sont l'objet d'une surveillance discrète. Selon les principes Pol Pot en version atténuée, il arrive que des gens soient arrêtés sans raison, et qu'ils doivent prouver leur innocence pendant plusieurs mois de prison préventive.

On écoute la Voix de l'Amérique en khmer, même très fort, sans que cela semble, apparemment, poser de problèmes. Dans la conversation courante, les gens n'hésitent pas à poser des questions sur ce que l'étranger pense du pays et de ses dirigeants.

Tous attendent la paix, mais sans trop y croire. Beaucoup craignent le retour des Khmers rouges comme une éventualité possible, précisément à cause de la corruption de l'actuel régime.

Présence vietnamienne

Officiellement l'armée vietnamienne a quitté le pays le 26 septembre 1989. A première vue, on ne décèle pas immédiatement la présence d'une colonie vietnamienne au Cambodge. Pourtant, en se promenant dans les rues, on voit des Vietnamiens partout: dans les maisons, au marché, sur le bord des fleuves. Le quartier de Russey Kéo, ainsi que celui situé derrière le village catholique sont peuplés exclusivement de Vietnamiens. Par contre il n'y en a pratiquement pas à Chrui Changvar. Tout l'artisanat, notamment la construction, est entre leurs mains, non seulement parce que traditionnellement les Khmers sont moins artisans (ils construisent toutefois très bien leurs pagodes et autres édifices), mais surtout parce que les jeunes khmers sont embrigadés dans l'armée, alors que les jeunes vietnamiens en sont exemptés.

A Kompong Chhnang, au « marché d'en-bas », il faut avoir de bonnes lunettes pour découvrir des Khmers ! Un dimanche matin, la radio diffusait à pleine puissance des chants vietnamiens depuis une île proche. Selon le président de l'Association des Vietnamiens de la province, les résidents vietnamiens y seraient au nombre de 10.000.

La colonie vietnamienne du Cambodge semble être surtout composée de pauvres gens qui viennent chercher une subsistance plus facile que dans leur patrie. Ils sont cependant encadrés par l'Association des Résidents vietnamiens du Cambodge qui dépend directement de l'Ambassade du Vietnam à Phnom Penh ou du consulat de Battambang. Cette ambassade délivre d'ailleurs des cartes d'identité cambodgienne barrées d'un trait, qui permettent aux Vietnamiens de circuler avec toute facilité entre les deux pays. Il est toutefois difficile d'avancer un chiffre précis. Certains parlent le khmer, car ce sont d'anciens résidant vietnamiens du Cambodge expulsés en 1970. D'autres ne parlent absolument pas la langue du pays. Les Vietnamiens vivent regroupés entre eux, car isolés, ils sont objet de la vindicte des Khmers. Un enfant vietnamien d'Arey Ksach (sur la rive du Mékong ouest, opposée à Phnom Penh) s'est fait rossé par ses condisciples de classe et a dû quitter l'école.

Personne, même dans les ministères, ne nie la présence de 6.000 experts vietnamiens. Quant aux militaires, ils sont présents, bien qu'il soit impossible d'en déterminer le nombre. On en parle comme « de nos amis ». Il est certain que sans leur présence Battambang, Siemréap et Kompong Thom seraient aux mains des Khmers rouges. Au début septembre dans les journaux de Bangkok on pouvait d'ailleurs lire des déclarations gouvernementales selon lesquelles les gardes cambodgiens des provinces de Siemréap et de Battambang allaient être doublés par des soldats vietnamiens. Des étrangers ont pu rencontrer, au Vietnam, des militaires qui rentraient récemment du Cambodge: ils y avaient fait du bénéfice puisqu'ils étaient payé en dollars. Quant aux services de police et du Ministère de l'intérieur, au dire d'un vietnamien rencontré, son personnel serait composé pour une importante proportion de Vietnamiens habillés en tenue cambodgienne. Une multitude de petits détails confirment cette présence: une vendeuse de cigarettes sur le trottoir affirme: « Ils me parlent en vietnamien". Lors d'un petit accrochage entre une moto et une bicyclette, le militaire cambodgien qui montait la moto ne parlait que le vietnamien; un ami étranger prenant une bière à Siemréap entendait des militaires "cambodgiens" ne parler entre eux que vietnamien.

Les Vietnamiens semblent n'être nulle part et partout, mais tiennent tout le pays en main. « La capitale du Cambodge, c'est Ho Chi Minh-ville », disait sans ambages un jeune homme. Rebaptiser le monument de l'indépendance « monument de la Victoire », et l'allée qui le flanque « Allée Ho Chi Minh » montre la désinvolture vietnamienne par rapport au peuple khmer.

L'Eglise

Depuis les décrets du mois d'avril accordant la liberté de culte aux diverses religions, l'Eglise du Cambodge retrouve une vitalité nouvelle, mais doit faire face, à nouveau, à la présence d'une nombreuse colonie vietnamienne.

Phnom Penh

Le 19 septembre, pour la première fois depuis 15 ans, le Pchoum Ben (jour des morts) a été célébré à Phnom Penh dans la maison du P. Destombes. Plus de 300 personnes y participaient activement. L’ambiance était joyeuse et fraternelle, les chrétiens khmers appartenant jadis à diverses paroisses (Kompong Cham, Kompong Ko, Moat Krasas, Hoaland), mais aussi quelques Chinois et une vingtaine de Vietnamiens s’étaient rassemblés. La messe était largement animée par les Khmers eux-mêmes, avec de nouveaux chants liturgiques composés pour la circonstance. Faute de bancs, tous étaient assis par terre et retrouvaient les gestes khmers traditionnels de la prière. Après la messe, dans une cérémonie du souvenir, les membres de chaque famille, sont venus afficher la liste de leurs disparus et offrir des fleurs, des bougies et des bâtonnets d’encens. Un repas suivait, chacun ayant apporté de la nourriture.

Durant ce rassemblement on pouvait constater l’énorme prix payé à la Révolution: cette communauté était relativement jeune, avec peu d’adultes, surtout parmi les hommes. A consulter les listes des défunts, on peut penser que des deux tiers des chrétiens ont disparu. Un premier recensement des chrétiens khmers de Phnom Penh donne 161 familles soit 744 personnes dispersées dans tous les quartiers de la ville.

Chaque jour les chrétiens défilent à la maison. Pratiquement chaque soir, le P. Destombes anime soit une réunion de préparation biblique, soit une réunion de préparation du catéchisme qui est assuré par 9 catéchistes dans les divers quartiers de la ville pour plus de 125 enfants et jeunes, soit une rencontre avec des adultes désireux de découvrir la foi chrétienne, soit une réunion du comité d’entraide chargé de manifester la charité des chrétiens aux plus pauvres. Depuis le 27 septembre, une prière en khmer est organisée tous les matins pour ceux qui le désirent.

Les problèmes sont nombreux. Si la communauté est organisée par un comité de chrétiens, reconnu par le Front, la présence du prêtre est le catalyseur qui permet, en partie, son dynamisme. Le P. Destombes est connu comme prêtre, mais il est reconnu par les autorités seulement comme le représentant ce Caritas Internationalis. Si la liberté est réelle, elle est tout de même très encadrée: le Comité doit rendre compte régulièrement au Front des activités des chrétiens, du nombre des participants, de leur nationalité, du montant de la quête, du nombre de nouveaux chrétiens, des baptêmes, etc. Dans un pays où toute activité sociale est l’exclusivité du Ministère de l’action sociale, l’action du comité d’entraide des chrétiens (6 membres), se doit d’être discrète, pour ne pas paraître en concurrence avec celui du ministère, ou être taxée d'activité politique, car les Khmers rouges opèrent de manière semblable. La participation du Comité à une distribution de colis aux mutilés et aux familles de soldats à la frontière, organisée par les autorités du quartier a fait sortir le Comité de l'anonymat et lui a acquis une certaine reconnaissance officielle. Des officiels cambodgiens viennent de temps en temps prendre des renseignements eux-mêmes.

La communauté cherche à acquérir un terrain pour construire un lieu de culte qui ne soit pas celui d'une ONG internationale, et également pour donner un signe visible et repérable de son existence. Le Front a promis un emplacement, mais cette promesse reste encore sans effet. La multiplicité des groupes chrétiens (évangéliques, Néo-apostoliques) pose des problèmes: les autorités voudraient dans l'avenir ne reconnaître qu'une dénomination chrétienne. A intervalle régulier, le Front convoque les représentants des diverses confessions pour faire le point de leurs activités. Selon un membre chrétien du Parti communiste, les Néo-apostoliques sont considérés comme suspects à cause de l'argent qu'ils donnent aux gens pour les amener à se convertir.

Le manque relatif de liberté peut être une chance pour l'Eglise: il évite d'aller trop vite, de réaliser des projets trop grands avec beaucoup d'argent. Il permet de mieux structurer la communauté et de lui laisser prendre ses responsabilités.

Moat Krasas

Deux communautés coexistent: d'abord un petit groupe de six familles khmères, composées essentiellement de jeunes gens et de femmes, sans hommes adultes. Ces Khmers se
sont installés à environ 3 kilomètres au nord de leur ancien village dont les terres ont été emportées par le Mékong. Un autre groupe comprend une dizaine de familles vietnamiennes vivant dans des barques et dans des maisons construites sur l'emplacement de l'ancienne
paroisse vietnamienne. Les Khmers sont très pauvres, alors que les Vietnamiens, vivant de la pêche sont relativement riches. Les Vietnamiens ont construit une petite église, grâce à l’aide financière du P.Thom Dunleavy. La messe y est célébrée chaque dimanche en khmer, animée par les Khmers, avec la lecture de l'évangile en vietnamien. Un jeune de Phnom Penh aide à l'enseignement du catéchisme. Bien que parlant le khmer (la plupart de ces Vietnamiens sont d'anciens du Cambodge), ils ne semblent guère apprécier cette liturgie en khmer.

Battambang

Un responsable chrétien est venu rencontrer le P. Destombes pendant mon séjour. Pendant huit ans il a pris de la distance par rapport à l'Eglise, car depuis 1982, il était menacé de prison, comme membre de l'administration, s'il continuait à pratiquer. Selon lui, le durcissement qui est apparu du côté des autorités en 1982 provient des activités du pasteur Clavaud (distributions intempestives de dons, recherche des généraux de Lon Nol). Sa fille, ainsi qu'un garçon chrétien sont speakers à la télévision provinciale.

Les chrétiens comptent 124 familles, soit 381 personnes. Ils sont organisés par un comité mixte comprenant 5 Khmer et 3 Vietnamiens. Actuellement les chrétiens ont officiellement l'autorisation de se réunir chez Phâl (180 personnes environ, surtout khmères), et chez Bora, soeur du P .Bénédictin Bernard, mariée à un soldat vietnamien (200 personnes, dont un certain nombre de vietnamiens).

Ce responsable a fait une demande pour construire un petit lieu de culte dans l'enceinte de l'ancien terrain de l'église. Les autorités du village et de la mairie ont donné leur accord, mais le Consul du Vietnam de Battambang s’y oppose, car il voudrait imposer la présence du président de l’Association des Vietnamiens de la province, de deux autres de ses agents dans le comité. « Les Vietnamiens ont plus d'expérience, » a dit le Consul.

On n'enseigne pas le catéchisme faute de livres, mais on se réunit pour prier et communier tous les dimanches. Beaucoup de gens ont demandé à devenir chrétiens parce qu'ils croyaient recevoir de l’argent, comme chez les Néo-apostoliques.

Chomom

Un responsable est venu spécialement de Chomom pour me rencontrer. Reconnu comme catéchiste par les nouvelles autorités, il a dû lui aussi arrêter ses activités en 1982. Depuis un an il est à nouveau reconnu comme responsable de la communauté. Les autorités provinciales lui ont demandé de réparer l'église, transformée en grenier à riz sous Pol Pot, et lui ont promis de venir l'inaugurer officiellement.

La communauté est organisée par un comité de 12 personnes dont le catéchiste n'est pas membre. Il y a actuellement 84 familles, comprenant 386 personnes, dont 63 nouveaux chrétiens qui assistent régulièrement aux offices du dimanche, beaucoup de chrétiens dispersés ou qui avaient pris des distances par rapport à l'Eglise lors de leur mariage avec des non-chrétiens demandent à étudier. Le responsable enseigne la langue khmère et le catéchisme tous les jours, préside l'assemblée du dimanche (il récite le canon, y compris les formules de la consécration).

Kompong Thom

J'ai pu rencontrer deux femmes de Kompong Thom. Les chrétiens seraient au nombre de
250 familles, mais peu unies, en butte à l'hostilité des fonctionnaires locaux, suite notamment
au voyage de nombreux chrétiens vers la frontière lors des années dernières.

Kdol

Selon un chrétien réfugié aux USA, le minuscule groupe de chrétiens de Kdol continuerait à vivre sa foi.

Chrétiens, montagnards

Par un planteur français de passage à Phnom Penh, nous avons appris qu'un groupe assez importants de montagnards de Quida, du Centre Vietnam se sont implantés dans la région de Ratanakiri. Leurs territoires situés au Vietnam ont été occupés par des Vietnamiens venus du Nord, et qui même, dans le secteur des trois frontières, auraient empiété de 20 km sur le territoire cambodgien.

Les chrétiens vietnamiens

En me rendant au Cambodge, je n'ai pas cherché à rencontrer les communautés vietnamiennes catholiques du Cambodge, sinon le petit groupe de Moat Krasas. J'ai cependant accompagné deux prêtres américains qui se rendaient à Kompong Chhnang pour y célébrer la messe pour les Vietnamiens. Une petite communauté d'une centaine de personnes s'y est réunie sur la terrasse d'un immeuble du marché, pavoisée aux couleurs du Vatican. Les prêtres célèbrent habituellement en américain, avec traduction en vietnamien. J'ai été invité au repas qui suivit la messe: tous les participants masculins de ces agapes étaient, membres de l’Association (politique) des Résidents Vietnamiens du Cambodge, et ne faisaient aucun mystère des liens qui les unissaient à l'ambassade. Le président était un chrétien de Krauchmar qui était enfant quand j'y était curé et que j'avais essayé, en vain, d'emmener à Kompong Cham en 1970. Un membre de l'Association m'a invité à aller à Vat Champa, où se trouve une grande église vietnamienne.

Il y aurait ainsi un certain nombre de lieux de cultes (14 paraît-il) pour les Vietnamiens. Cela ne va pas sans poser de problèmes dont la solution engage l'avenir de l'Église du Cambodge. Si l'Eglise doit se montrer attentive aux besoins spirituels des immigrants vietnamiens et s'efforcer d'y répondre, elle ne doit pas être dupe des visées politiques que porte cette immigration: il semble que le Vietnam veuille utiliser, l'Eglise comme un des moyens de colonisation du pays, en favorisant le regroupement de ses ressortissants. De passage à Ho Chi Minh-ville, j'en ai eu confirmation indirecte par un membre de l'Eglise patriotique qui veut organiser une visite de prêtres vietnamiens au Cambodge en décembre prochain. Tant que la situation politique est incertaine, l'Eglise ne peut offrir que le minimum de services religieux aux immigrants vietnamiens, et en langue khmère, du moins dans les manifestations officielles.

Il convient à l'Eglise de se montrer vigilante pour ne pas répéter certaines erreurs du passé, alors qu'à la fin du XIXè et du début du XXè siècle et dans un autre contexte, l'Eglise, s'inspirant des schémas coloniaux, favorisait l'implantation vietnamienne au Cambodge. Cela lui valut d'être considérée par les Cambodgiens comme doublement étrangère, et par ses origines, et par ses communautés. L'évangélisation des Khmers en a été de ce fait compromise pendant près d'un siècle.

Alors que l'Eglise du Cambodge renaît de ses épreuves, avec la fragilité que l'on sait, alors qu'elle a l'opportunité et la volonté de se présenter au service du peuple khmer du Cambodge, une action pastorale intempestive et unilatéralement auprès des immigrants dont la présence est perçue négativement par l'opinion publique, risque de grever lourdement les chances de l'évangélisation des Cambodgiens. L'action pastorale au Cambodge requiert une prudence et appelle une coordination.

La vitalité des chrétiens khmers, la fraîcheur de leur foi, leur joie de se retrouver ensemble m’a fait vivre un grand moment des Actes des Apôtres. Bien que l’avenir soit incertain, ils sont signe d’Espérance.

François PONCHAUD, le 1.10.90

Publié par Khemara Jati
Montréal, Québec
15 décembre 2007

Histoire secrète de la reprise des relations sino-américaines

Nouvelles du Cambodge N° 0748-EF (suite)

CHINA-FRANCE-USA SECRET RELATION CHINE-FRANCE-USA

Histoire secrète de la reprise des relations sino-américaines,
de 1970 à 1972,
par le général Vernon Walters, diplomate américain,
ex-Président du Conseil de Stratégie Globale des Etats-Unis
Date de la mise en ligne: septembre 2001

La révolution communiste chinoise de 1949 a provoqué une rupture entre la Chine et les Etats-Unis. Il n'y a pas eu de véritables contacts diplomatiques entre ces deux pays jusqu'en 1970. Voici l'histoire de la reprise de leurs relations diplomatiques, entre 1970 et 1972. L'homme qui a été chargé de cette mission secrète par le Président des Etats-Unis raconte.

Peu après son élection en 1968, le Président Richard Nixon est venu en France, où j'étais attaché militaire à l'Ambassade des Etats-Unis, à Paris. Dans l'intervalle entre son élection et sa prise de fonction, il m'avait confié qu'il comptait se rendre en Chine avant la fin de son mandat. Seul un président de « droite », républicain, pouvait le faire sans être violemment critiqué. Lors de ce séjour, il m'a déclaré : « Je veux prendre contact avec les Chinois et le faire ici, à Paris ». Parce que l'Ambassadeur de Chine à Paris est le seul qui n'a pas été rappelé pour être envoyé travailler sur les communes agricoles à la faveur de la Révolution culturelle. Le Président R. Nixon a ajouté : « Je veux que vous preniez ce contact et que vous n'en disiez rien à vos supérieurs hiérarchiques, tant à l'ambassade des Etats-Unis à Paris qu'au Pentagone. C'est un ordre du Commandant en Chef. Me reconnaissez-vous comme tel ? ». J'ai répondu :"Bien sûr Monsieur le Président, la Constitution est claire à ce sujet".

Le problème était que les Chinois et les Américains, quand ils se voyaient dans les réceptions en France ou dans d'autres pays, ne se parlaient pas et feignaient même de ne pas se voir.
Comment faire pour prendre contact ?

Un petit cri
Le 27 avril 1970, à l'Ambassade de Pologne à Paris, je suis resté seul dans la cour avec l'attaché militaire chinois, Fang Wen. Je me suis approché et je lui ai dit : « J'ai une lettre signée du Président Nixon pour le Président Mao ». Absolument effarouché, il a poussé un petit cri, sauté dans sa voiture et il est parti.

Aussitôt, j'ai envoyé un télégramme à Henry Kissinger. Il était alors Conseiller diplomatique du Président mais n'avait pas encore le poste de Ministre des Affaires étrangères. En chiffrant moi-même le message pour que personne n'en ait connaissance à l'Ambassade, je lui ai demandé : « Les Chinois ont refusé d'accepter la lettre, que dois-je faire ? ». Il a répondu : « Livrez la lettre ! »

Pour ne pas laisser ma voiture diplomatique avec la plaque CD5 aisément reconnaissable, je suis allé à pied à l'ambassade de Chine à Paris et j'ai livré la lettre, le 18 mai 1970. Un diplomate chinois m'a dit : « Naturellement, nous ne pouvons pas vous donner de réponse, seul Pékin peut le faire ». Pékin a donné son accord et plusieurs jours après je suis venu parler avec des responsables chinois à propos des formes que pourraient prendre les négociations pour une reprise des relations diplomatiques et des relations de toutes sortes, parce qu'elles étaient complètement rompues entre ces deux pays. Par exemple, les Chinois m'ont demandé s'il était possible aux Etats-Unis que soit élu un Gouverneur d'un autre parti politique que le Président. J'ai répondu : « Oui, c'est le cas de près de la moitié des Gouverneurs », ce qui les a surpris.

H. Kissinger clandestin
Après une dizaine de rencontres avec eux, les Chinois m'ont dit : « Nous voulons maintenant parler avec H. Kissinger ». Il est venu mais après m'avoir fait comprendre qu'il fallait que son déplacement reste totalement clandestin et que personne ne le sache, y compris du côté des autorités françaises. H. Kissinger arrivait des Etats-Unis en Europe sur une base aérienne militaire du Royaume-Uni et j'allais le chercher avec l'avion dont je bénéficiais alors comme attaché militaire. Habituellement, les Français n'inspectaient pas mon avion et ainsi se sont tenues entre 1970 et 1972 quinze rencontres secrètes, à la Résidence de l'Ambassade de Chine à Neuilly, non loin de Paris. La première rencontre a eu lieu le 19 juillet 1970. Côté chinois, les participants étaient l'Ambassadeur Huang Chen et deux adjoints, Tsao Kuei Sheng et Wei Tung. Côté américain il y avait H. Kissinger et V. Walters.

Le Dr Kissinger est donc quinze fois venu clandestinement en France, ce qui était très difficile pour un personnage qui passait deux fois par jour à la télévision. J'avais une gouvernante à la maison qui me disait : « Je connais ce Monsieur, c'est le Dr Kissinger ». « Non, c'est un général américain, d'origine allemande et israélite, peut être est-il parent. Le Dr Kissinger est ministre, s'il était à Paris il serait chez l'Ambassadeur, pas chez moi ».

H. Kissinger était en même temps en train de négocier avec les Vietnamiens. Question de sécurité j'avais donné dans nos échanges le surnom d'André aux Vietnamien et de Jean aux chinois, parce que c'est la moitié de l'alphabet.

"Il faut demander l'aide du Président Georges Pompidou"
Les négociations ont commencé et se sont déroulées relativement bien, jusqu'à ce que le Pentagone décide de me prendre mon avion, par mesure d'économie. J'ai demandé à Kissinger de le protéger mais il a refusé parce que s'il le protégeait on saurait qu'il s'en servait. J'ai donc perdu l'avion. Comment le faire rentrer en France ? H. Kissinger m'a dit : « Tu peux me faire entrer en France sans que les Français le sachent ? ». J'ai répondu : « Non. Docteur Kissinger, à l'âge de huit ans, j'ai été arrêté à Paris, au Champ de Mars, pour avoir circulé à vélo sans avoir acheté une plaque que l'on achetait dans les bureaux de tabac pour 18 francs. Quarante sept ans plus tard, les Français m'en ont parlé ». « Ah ! … Alors que faisons-nous ? » « La seule manière de s'en sortir c'est de demander l'aide du Président Georges Pompidou ». Je vais voir le Président de la République Française et lui explique la situation. Il nous promet son aide.

A partir de ce moment, H. Kissinger atterrissait sur une base de la force de frappe française, à Bourges. Vu de loin, son avion semblait se confondre avec les avions citernes de la force de frappe, à condition de ne pas voir les symboles américains. Les négociations ont donc repris avec les Chinois.

Un risque d'accident
Un soir, alors que je l'attends à Paris, je reçois un coup de téléphone affolé de son adjoint - devenu plus tard le ministre des Affaires étrangères des Etats-Unis, Alexander Haig - qui me dit : « L'avion de Kissinger est en vol mais il a une panne hydraulique qui rend hors service son système de freinage. Il va falloir qu'il atterrisse sur un terrain qui dispose d'une barrière d'arrêt, comme celle d'un porte-avions ». Il était neuf heures du soir.

Après avoir réfléchi, je vais à pied de l'Ambassade américaine à l'Elysée et je demande à voir le Président G. Pompidou. Heureusement, ayant précédemment accompagné le Président G. Pompidou dans un long voyage aux Etats-Unis, je le connaissais donc mieux qu'un attaché militaire qui, habituellement, n'approche pas le chef de l'Etat. Je lui raconte l'histoire et il téléphone aussitôt à son avion présidentiel basé à Villacoublay. Puis il me dit : « Allez à Villacoublay, mon avion va vous emmener à Francfort, seul terrain disposant d'une barrière adéquate et vous ramènerez H. Kissinger en France, dans mon avion ». Je quitte l'Elysée pour Villacoublay, l'avion présidentiel français décolle à peine une heure après mon départ de l'Elysée. Ce qui est un temps de réaction extraordinairement court pour un avion présidentiel, bien que l'équipage réside à Villacoublay.

Nous arrivons en Allemagne, je monte dans l'avion américain et rencontre Kissinger, affolé, ne sachant pas ce qui se passait. « Nom de Dieu, que je suis content de te voir », m'a t-il dit, avant de me demander « que fait-on maintenant ? ». « Dr Kissinger, retirez vos lunettes, remontez votre col parce qu'il y a ici plein d'américains capables de vous reconnaître ». C'est la première fois de ma vie que j'ai vu un Kissinger doux et obéissant. Il se montre d'habitude volontiers récalcitrant.

"Dites qu'il s'agit d'une femme"
Nous passons dans l'avion français et sur la route de Paris, le pilote me demande de venir le voir dans le cockpit. « Que vais-je dire aux Allemands ? Ils savent que cet avion est celui du Président de la République Française. Sans plan de vol et sans autorisation de survol, celui-ci a pénétré l'espace aérien allemand et atterri à Francfort. Neuf minutes plus tard, il est reparti avec un passager inconnu. Que dois-je leur dire quand ils vont demander une explication ? » « Dites donc qu'il s'agit d'une femme, ils le croiront venant des Français et ils seront discrets », ai-je répondu.

Nous atterrissons à Villacoublay à deux heures du matin. Nous arrivons à Paris par le bois de Meudon et le Dr Kissinger me demande pourquoi je l'emmène par-là au risque de le faire reconnaître, alors qu'il n'y avait pas un chat. Fatigué et irrité, je lui réponds : « Dr Kissinger, pourquoi ne dirigez-vous pas le monde, tout en laissant les détails à mes soins, je connais mieux l'affaire que vous ». « Ah, personne ne me parle de cette façon ! ».

Finalement, il rencontre les Chinois, les visites se multiplient et l'accord se fait pour une visite du Président R. Nixon en Chine.

Entre temps, je rencontre le colonel français de l'avion présidentiel et lui demande : "Les Allemands sont-ils venus ?". "Oui, le lendemain matin, quand je suis arrivé à mon bureau, l'attaché de l'air allemand m'attendait en uniforme pour m'interroger sur cette mission mystérieuse. Je lui ai raconté l'histoire de la femme mais il avait une autre question à propos de la nationalité de la femme en question. J'ai abondé dans son sens et il a été satisfait".

Le voyage du Président Nixon en Chine
Les négociations américano-chinoises sont finalement devenues publiques et le voyage de Nixon a été organisé, en février 1972. Il y a eu des tas de détails à régler, comme la hauteur de l'échelle, la manière de mettre du carburant dans l'avion … mais peu à peu nous sommes passé d'une reconnaissance formelle à une reconnaissance officielle. Finalement, après trois décennies de rupture, les Etats-Unis ont développé des relations diplomatiques normales avec les Chinois. Voilà comment s'est terminé l'absence de relations entre la Chine et les Etats-Unis.

Seul le Président Pompidou en a été informé, quand il n'y a pas eu d'autre possibilité. Mis à part, lui, aucun Français ne m'a encore dit "je savais". Peut-être le Président français l'a-t-il confié à un ministre ou à un conseiller, mais le secret de ces contacts à Paris a été maintenu jusqu'à la fin des négociations.

Finalement, la communication entre les Américains et les Chinois s'est développée parce que les deux parties le recherchaient, par crainte des Soviétiques. Au tournant du millénaire, les relations entre la Chine et les Etats-Unis sont denses.

Voir une carte de la Chine

Les communistes chinois ont soutenu les Vietnamiens durant la guerre et il y a avait des points de friction très nombreux entre les Etats-Unis et la Chine, mais aujourd'hui le seul problème est que nous achetons à la Chine 50 milliards de dollars de plus que nous ne leur vendons. La balance de paiement américaine est donc très défavorable avec la RPC, mais nous avons des relations diplomatiques complètes. Où cela ira, je ne sais pas, il est vrai que la question de Taïwan est assez sérieuse.

Où va la Chine ?
Le plus ancien traité d'alliance des Etats-Unis a été signé avec Taïwan, un an avant à la création de l'OTAN. Nous les avons assurés que nous les défendrions. C'était un régime chinois, pas très démocratique à l'époque mais qui l'est devenu par la suite. Le problème est aujourd'hui compliqué, parce que la République Populaire de Chine revendique Taïwan comme une partie intégrante de la Chine, bien que cela ne l'aie été que peu de temps et voici bien longtemps. Les taïwanais parlent le mandarin et paraissent chinois, mais leur revenu par tête est de 21 000 $ par an, alors qu'il est de 500 dollars par habitant en RPC. Les Taïwanais ne sont donc pas très motivés à l'idée d'intégrer la Chine actuelle, avec un gouvernement qui continue à se déclarer communiste. Taïwan a la deuxième réserve d'or du monde, devant l'Allemagne.

Où va la Chine ? Quelle doit être notre politique vis-à-vis de ce pays ? Ce mouvement communiste peut-il durer avec la liberté de mouvement et la croissante richesse de ce pays ? Il y a aujourd'hui en Chine une liberté de mouvement extraordinaire, une bourse, des investissements privés … En revanche, la persécution religieuse demeure, pour des raisons ataviques. Il faut tâcher de ne jamais être surpris. Il me paraît essentiel que l'Occident formule une politique pour ce que nous ferons s'il y a des changements extrêmement profonds en Chine, comme en Russie.

Vingt ans après ces missions secrètes, je suis allé en Chine et j'ai réservé une cabine sur un bateau qui descend le Yang Tze à travers les gorges. Arrivé dans le bateau, je constate que je ne dispose pas d'une cabine habituelle mais la suite sous le pont du Commandant, avec toute la vue sur l'avant du navire. J'ai dit au capitaine : « Je crois qu'il y a une erreur dans l'allocation de ma cabine ». « Croyez-vous que nous ne savons pas qui vous êtes ? ».

Général V. Walters
Témoignage recueilli par Pierre Verluise, en décembre 2000.
NB: Le général V. Walters est décédé le 10 février 2002

Mots clés - key words : général vernon walters, géopolitique, états-unis, chine, france, négociations secrètes de 1970 à 1972 pour la reprise des relations diplomatiques sino-américaines, président richard nixon, républicain, pentagone, henry kissinger, alexander haig, fang wen, huang chen, tsao kuei sheng, wei tung, georges pompidou, voyage de 1972 de richard nixon en chine, taïwan, politique chinoise.

Posted by / Publié par Khemara Jati
Montréal, Québec
15 december 2007

Invasion massive des colons vietnamiens

Nouvelles du Cambodge N° 0748-F

CAMBODGE : Invasion massive des colons vietnamiens

Khemara Jati
Montréal, Québec
Le 15 décembre 2007

Nous publions ci-dessous la position du SRP concernant la présence massive des colons vietnamiens au Cambodge, d’après une déclaration récente et un témoignage de François Ponchaud dans son « Compte Rendu de Mission au Cambodge », du 16 au 27 septembre 1990.

Pour lire le rapport de François Ponchaud, il faut savoir que ce dernier est Français et prêtre catholique vaticane. Il faut placer aussi ce voyage dans le contexte suivant :

§ 9 novembre 1989 : Chute du Mur de Berlin, prélude à la dislocation de l’URSS.
§ 18 juillet 1990 : James Baker, Secrétaire d’Etat US, de retour de Moscou, ayant constaté la confirmation de la dislocation imminente de l’URSS, à sa descente d’avion déclare : « The United-States withdrew support from Cambodia guerilla coalition ».
§ 5 septembre 1990 : James Baker, Secrétaire d’Etat US annonce que les Etats-Unis discuteront désormais directement avec Hun Sen. Hanoi est satisfait de cette décision américaine.

Il faut aussi se rappeler que le Japon était déjà entré en relation avec Hanoi depuis le 8 février 1972, soit un peu plus d’un mois avant la poignée de main historique Mao–Nixon à Pékin le 21 février 1972, en pleine Révolution Culturelle. Rappelons aussi que cette poignée de main a été précédée par des négociations secrètes entre les USA et la Chine, par l’intermédiaire de la France depuis 1970 (nous publierons un rapport sur ces négociations, ci-dessous). La mission de Ponchaud se situe donc un peu plus d’une semaine après l’annonce des relations directes entre les USA et Hun Sen.

Khemara Jati souhaite poser au SRP les questions suivantes :

1) Maintenant la ville de Siem Reap et une grande partie de nos provinces de l’Ouest utilise l’électricité venue de Thailande. Ainsi nos provinces de l’Ouest sont déjà dépendantes en énergie électrique de la Thailande. La Thailande ne possède-t-elle pas déjà un énorme moyen de pression sur le Cambodge ? Un pays dépendant en énergie électrique d’un pays étranger, peut-il être indépendant ? Existe-t-il dans le monde un pays développé donc indépendants politiques, dans ce cas ?

2) La Banque Mondiale finance la construction des lignes électriques à haute tension en provenance du Vietnam pour alimenter en électricité nos provinces du Nord-Est et de l’Est en électricité. Dans ces conditions le Cambodge peut-il être indépendant du Vietnam ?

3) Les Vietnamiens vont construire deux centrales hydroélectriques dans nos provinces du Nord-Est. N’est-il pas une autre dépendance insupportable vis à vis de notre voisin de l’Est ?

4) Le Japon est en train d’aider le Vietnam à construire des autoroutes reliant nos provinces du Nord-Est à un port vietnamien de l’Est pour écouler nos richesses de cette région par un port vietnamien. Est-ce dans les intérêts nationaux cambodgiens ?

5) Les USA envisagent de construire une autoroute avec trois voies dans chaque sens entre Prey Nokor et Phnom Penh, alors que nous avons besoin d’une telle autoroute entre Phnom Penh et Sihanoukville. Pourquoi cette nouvelle facilité aux colons vietnamiens accordée de venir encore plus nombreux au Cambodge ?

6) Nous construisons des centres de développements à nos frontières avec de bonnes routes partant de ces centres chez nos voisins et de mauvaises routes de ces centres vers Phnom Penh. Ces centres vont-ils utiliser les gestionnaires, des ingénieurs et des techniciens Cambodgiens ? Les productions de ces centres vont-ils enrichir notre port de Sihanoukville ou au contraire ne vont-ils pas enrichir les ports de Prey Nokor et de Bangkok ? Avec l’utilisation massive des gestionnaires, ingénieurs et techniciens vietnamiens et thaïs ?

7) Toutes ces constructions ne sont et ne seront-elles faites avec des ingénieurs, techniciens et autres à 100 % non Cambodgiens ? Cela n’explique-il pas que 300 000 diplômés cambodgiens sont toujours au chômage ?

Ci-dessous :

a) Position du SRP sur l’invasion massive des colons vietnamiens au Cambodge.
b) Le « Compte Rendu de Mission au Cambodge, du 16 au 27 septembre 1990 ».
c) Rapport sur les négociations secrètes entre les USA et la Chine de 1970 à 1972.

Annexe :

SRP Exposes CPP, Ranariddh, Yu Hokkri in Illegal Vietnamese Immigrants Deal

SEP20071212045001 Phnom Penh khmernews WWW-Text in Cambodian 11 Dec 07
[Report by Roat Visal]

The Cambodian National Assembly passed the Immigration Law in 2001. However, not only has the Hun Sen government failed to enforce this law but it has tried to cover up the presence of illegal Vietnamese immigrants by allowing them to live in the country and helping these millions of Hun Sen's Vietnamese brothers and sisters to fill forms and documents. Besides receiving documents making them Cambodian citizens, millions of illegal Vietnamese immigrants also have been issued voter cards that allow them to vote for the Cambodian People's Party [CPP] officials, especially for Hun Sen, Heng Samrin, and Chea Sim, so that they would continue to wield power for a long time and keep repaying Vietnam for the service it rendered them.

The CPP officials are not the only ones to have legitimized the immigration of the Vietnamese all over the country, the FUNCINPEC [National United Front for an Independent, Neutral, and Peaceful Cambodia] Party when Prince Ranariddh was its historical president also connived with the CPP in forcefully helping these illegal Vietnamese immigrants. For instance, former Minister of Interior Yu Hokkri co-signed with Sar Kheng, the then co-minister of interior, an order in April 2003 permitting the illegal Vietnamese spearheaded by an army of prostitutes to establish associations in 19 provinces and cities throughout the country.

Now, Yu Hokkri, secretary-general of the Norodom Ranariddh Party [NRP], and Prince Ranariddh are making great noise about their so-called campaign to oppose the illegal immigrants. The Cambodian public understands that this vociferation is just a maneuver or a dark scheme of dishonest politicians in the NRP.

The Sam Rainsy Party [SRP] counts the enforcement of the Immigration Law among the 10 measures set for the SRP government. This measure is that the SRP government will thoroughly and effectively enforce this law as of 2008 because to let the illegal Vietnamese immigrants live in full anarchy throughout the country like this constitutes a most impertinent violation of Cambodia's sovereignty, and the presence of these illegal Vietnamese is also a demographic war to implement the Vietnamization of Cambodia. The most serious danger to the survival of the Cambodian nation and people is if the present ruling CPP continues to rule the country.

Hun Sen, Heng Samrin, and Chea Sim of the CPP are taking care of the millions of illegal Vietnamese in Cambodia because Vietnam has installed them in power through the 7 January 1979 Vietnamese aggression against Cambodia. Another reason is that these millions of Vietnamese constitute an important force that has voted for the group of Vietnamese lackeys in Phnom Penh so that they can keep on wielding power and controlling Cambodia on behalf of Vietnam according to the late Ho Chi Minh's Indochinese Federation policy, which is to make Cambodia a Vietnamese province in the future just as the Vietnamese ancestors annexed Champa and Kampuchea Krom in the past. If the CPP leaders, especially Hun Sen, Heng Samrin, and Chea Sim do not protect and take care of the illegal Vietnamese their political and non-political lives would not be pleasant, especially vis-୶is their Vietnamese bosses because history showed many times before that any Vietnamese pawns who did not obey Hanoi's orders never escaped punishment. For this reason, it can be said that the CPP leaders have inextricably bogged themselves down in the policy of perpetual servitude toward the Vietnamese.

Let alone the CPP, particularly the three Governors General (the three Samdech), who cannot free themselves from the steel dragnet of the Vietnamese, but Yu Hokkri and Prince Ranariddh also sided with the CPP in legitimizing the Vietnamese immigrants.

When FUNCINPEC was still a resistance movement, it had three main principles: to drive out the foreign bandits and their lackeys, to fight corruption, and to defend territorial integrity. These three principles, however, have been completely trampled underfoot by the FUNCINPEC leaders after FUNCINPEC joined the coalition government with the group of former Khmer Rouge servants of Vietnam, namely, the CPP since 1993. Prince Ranariddh himself when he was first prime minister in the first term and speaker of the National Assembly in the second term and the first half of the third term was intoxicated by power. He consented to give up the supreme principles of the FUNCINPEC Party and connived with the CPP in blindly serving the policy of Vietnam. Prince Ranariddh and Yu Hokkri not only trampled on the three principles, their satellite party even helped to legalize the CPP's signing of the supplemental treaty, which cut off Cambodia's land, waters, vales, and mounts and effortlessly handed them to Vietnam.

Now that his luck ran out, Prince Ranariddh lost all his positions of power and was forced to flee abroad, leaving behind wife and children, daring not to return to the country. Likewise, Yu Hokkri has been expelled from the FUNCINPEC Party and is left wondering what would soon happen to him next. These persons now feign patriotism by raising a ruckus about the Vietnamese immigrants, the border problem, and corruption.

The opposition party officials and the Cambodian people say that Samdech Krom Preah [Ranariddh] and his sycophants are the ones who have betrayed the principles, who are corrupt, who have stomped on democracy and territorial integrity, who sold national independence to foreign countries, and who have bowed their heads to become the lackeys of the Vietnamese puppets. For this reason, the people say that the vociferation by Prince Ranariddh and Yu Hokkri about fighting corruption and resolving the Vietnamese immigrants issue is just a plaintive whimpering of the men before they fall out of the political arena. Theirs is not a rallying cry for the salvation of the nation and people.

Those who would really save the country and the people from Vietnam's colonialist yoke once and for all are the democrats led by the SRP. One point in the SRP's 10-point program for the SRP government to implement after 2008 deals with enforcing the Immigration Law. The SRP government will surely be effective in enforcing this Immigration Law because the SRP does not owe Vietnam anything, unlike the CPP officials. The SRP is indebted toward only the Cambodian nation and people. For this reason, the SRP is doing everything despite countless big and small obstacles erected by the Vietnamese lackeys in the cause of the nation and people.

The Vietnamese lackeys are aware that their group's dishonest policy of keeping millions of illegal Vietnamese immigrants in Cambodia is not good for the masters of the country. But they still try with difficulty because they have no other choices since their bosses have deployed experts and agents all around them who keep an eye on them everyday. If they dare to let any secret leak out that they want to deviate just a little bid from the line traced by Vietnam, they would share the fate of former Prime Minister Chan Si.

Contrary to the CPP, the SRP owes Vietnam nothing, not even a cent. Therefore, the duty of the SRP is to salvage Cambodia and free it from the Vietnamese yoke of slavery, turn this country into a fully independent country, liberate the people from bondage brought on by the power of the dishonest politicians among the CPP leaders, and turn them into true masters of an independent, sovereign, and self-determining country, thus once and for all wiping away the domination influence of the aggressor Vietnamese bandits.

Brief, this is not the time for Prince Ranariddh and Yu Hokkri to do the shouting, yelling, vociferating to extol their skin-deep theory of patriotism when their group is already half buried in the ground. Prince Ranariddh and his group are making noise before they are gone for good and, thereby, what they are shouting is useless. The party that can liberate Cambodia from a dictatorial regime, corruption, and servitude toward Vietnam, the party that can really effectively enforce the Immigration Law is none other than the SRP.
End