2008-04-23

Voeux de la Nouvelle Année Chnam Chout 2552

Nouvelles du Cambodge N°0822-F

VOEUX POUR LA NOUVELLE ANNÉE
CHNAM CHOUT 2552

Khemara Jati
Montréal, Québec
Le 20 avril 2008

Nous retardons volontairement nos souhaits pour la nouvelle année Chnam Chout en signe de solidarité avec nos sœurs, frères et compatriotes du Kampuchea Krom, interdits par les autorités vietnamiennes de la fêter. Cette information nous a été communiquée, un peu avant le 13 avril, par nos compatriotes du Kampuchea Krom et confirmée par l’article ci-dessous. Hanoi est en train de pratiquer un véritable ethnocide culturel sur les Cambodgiens du Kampuchea Krom. Par la même occasion, nous soutenons les luttes courageuses de nos sœurs et frères du Kampuchea Krom pour défendre leur culture et écriture ancestrales plurimillénaires. Ces luttes font parties des luttes multiformes de nos compatriotes pour libérer le Cambodge de toutes les dominations étrangères, en particulier de la domination vietnamienne.

En ce début de la nouvelle année Chnam Chout 2552, nos pensées vont d’abord, aussi, à nos sœurs et frères expulsés manu militari, ou par l’incendie, de leur modeste demeure, justement durant cette période de festivité.

Nos pensées vont à tous celles ou ceux, adultes et enfants, qui sont obligés de vivres dans l’atmosphère pestilentielle des décharges publiques, pour ramasser quelques pacotilles pour les revendre pour quelques centimes, de quoi pour ne pas mourir de faim. Nantarayao Sampotho, alias Kompheak, a décrit avec sympathie ces vies en enfer de nos sœurs et frères.

Nos pensées vont à nos compatriotes trop pauvres et obligés de vendre leurs enfants pour survivre combien de temps Nos pensées vont à ces filles et garçons qui sont obligés de se prostituer pour vivre combien de temps ?

Chaque année 300 000 jeunes Cambodgiens entrent dans le marché du travail. Seuls 30 000 trouverons du travail et les 270 000 autres resteront au chômage. Sur ces 270 000 chômeurs combien sont de niveau universitaire ? Cette masse de chômeurs n’est-il pas le résultat tangible du système universitaire actuel ? On nous annonce la création des universités, mais aucune faculté de lettre, aucun Institut d’histoire ni de géographie. On nous annonce que notre PIB augmente chaque année de près de 10 %, qui empochent ces richesses ? Combien d’étrangers ? On nous annonce que la construction bat son plein. Qui travaillent dans ces constructions ? Dans la direction, parmi les gestionnaires, les ingénieurs, les techniciens, quelle est la proportion des Cambodgiens ? Qui sont ces étrangers ? Pourquoi, toujours aucune information sur ces sujets ?

Dans les usines textiles et constructions, pourquoi les Cambodgiens ne fournissent-ils, principalement, que le travail musculaire ? Pourquoi un nombre toujours croissant de nos compatriotes sont-ils obligés d’aller trouver du travail manuel pour des salaires de misère chez nos voisins et dans des pays aussi lointains que la Corée du Sud ?

Pourquoi le Cambodge continue-t-il à être de loin le pays qui compte la proportion la plus élevée d’illettrés (près des 50 %), de mortalité des femmes en couche et de mortalité infantile ?

Dans ces conditions comment pouvons-nous nous réjouir de la situation de notre pays ?

Au point de vue infrastructure, pourquoi certaines grandes puissances nous imposent notre dépendance énergétique, surtout au point de vue énergie électrique, vis-à-vis de nos voisins ?

Nous allons avoir du pétrole et du gaz, mais pourquoi, toujours pas de projet pour construire une raffinerie de pétrole ? Pourquoi n'y a-t-il encore, aucun projet pour construire des centrales électriques utilisant notre pétrole et notre gaz ? Pourquoi permettre aux Vietnamiens de venir construire deux barrages hydroélectriques sur nos terres et puis nous vendre cette électricité produite avec naturellement de gros bénéfices ? Pourquoi nos voisins nous obligent-ils à payer leur électricité 50 % plus chère ? Ne sont-ils pas sont en position de monopole ?

Maintenant, il y a le problème de la pénurie de riz. Le Cambodge produit suffisamment de riz pour la nourriture de son peuple avec un surplus annuel de un à deux millions de tonnes et par fois plus. Mais faute de bonnes routes de nos frontières vers Phnom Penh, le Cambodge est obligé d’exporter annuellement, en moyenne, un million de tonnes de riz par Saigon, comme riz vietnamien. Parce que le Vietnam possède de très bonnes routes de nos frontières vers Saigon, routes construites avec les aides du Japon. Mieux, le riz cambodgien est de meilleure qualité que le riz vietnamien. Ce qui fait que le riz cambodgien est consommé par les Vietnamiens qui exportent à la place le riz vietnamien de moins bonne qualité.

Maintenant le pouvoir prétend interdire l’exportation de notre riz ! Mais comment cette interdiction peut-elle être appliquée, si nos routes vers Phnom Penh sont mauvaises et s’il n’y a, pratiquement, aucune infrastructure pour organiser convenablement ces exportations par Sihanoukville ?

Il y a maintenant une bataille importante concernant le temple de Preah Vihear. Très bien. Mais pourquoi la route menant de Kompong Thom à Preah Vihear est-elle toujours en de si mauvais état ? Pourquoi avoir stoppé la construction de cette route entreprise par Chea Sophara en 2003 ? Pourquoi, pour avoir entrepris cette construction, a-t-il été limogé sur ordre du Vietnamien Hoc Lundy, le 11 février 2003 ? On annonce mainte fois que cette route est en construction. Cette fois-ci sera-t-elle réalisée ? Pourquoi la route de Sisophon à Seam Reap ville reste-t-elle toujours en très mauvais état ? Les touristes étrangers qualifient cette route et celle allant à Preah Vihear de « Dancing Road » ou de « Hell Road » ! Actuellement ce sont les bonzes et la population de la région qui occupent jour et nuit Preah Vihear. Chea Sophara a prévu de construire en plus de la route, un téléphérique pour permettre aux personnes âgées, handicapées, malades ou fatiguées de parvenir au temple. Ce téléphérique sera-il construit un jour ?

Pour permettre le développement des échanges commerciaux et des communications rapides entre les villes et la campagne, ne faut-il pas construire rapidement des bonnes routes partout, entre nos villes et la campagne, en particulier vers nos zones frontières ? Maintenant avec les congés du nouvel an, nos compatriotes doivent encore surmonter de longs trajets sur de très mauvaises routes pour rejoindre leurs villages. C’est une perte de temps, d’énergie et d’argent inutilement. En plus ces routes en permettant des relations faciles entre les villes et la campagne, contribuent au renforcement de la solidarité entre les villes et la campagne et donc la solidarité nationale.

Enfin le problème le plus important. Le développement de notre langue maternelle léguée par nos ancêtres depuis deux mille ans, la plus vieille et la plus belle langue écrite de notre région.

« Nous sommes tous choisis par une langue maternelle. Elle nous est imposée par les conditions mêmes de notre naissance. A cela nul ne saurait échapper. Et même si, chaque jour, les hommes se battent et meurent pour agrandir leur espace de liberté politique, personne ne peut espérer ne même revendiquer sérieusement comme un droit futur, la liberté de choisir sa langue maternelle. Comme on ne peut pas, non plus, choisir de ne pas être né, ni dans quelle famille, ni dans quel pays, ni dans quelle classe sociale, ni avec quel sexe ou quelle couleur de peau, on ne peut davantage choisir quelle langue parler en premier. Aucune utopie ne permettra sans doute jamais de modifier cette contrainte, même si, en avançant dans la vie, il devient possible de la dépasser. » Jacques Attali.

Nous ajoutons, en plus, que, pour nous Cambodgiens, notre langue maternelle contient une charge émotionnelle léguée par nos ancêtres depuis des millénaires. Car chaque mot évoque des souvenirs gravés dans notre cerveau durant notre plus tendre enfance. Il y a la mélodie des sons qui cadre avec le paysage, avec la douceur maternelle et la beauté de l’écriture. Cette beauté des caractères cambodgiens n’a-t-elle pas émerveillé la célèbre actrice américaine Angelina Jolie ? Cette actrice a adopté un enfant cambodgien qu’elle donne comme prénom Maddoc et a fait tatouer sur son omoplate gauche cinq lignes d’une prière cambodgienne. Cette prière en écriture cambodgienne est exhibée fièrement, durant les soirées où elle porte une robe décolletée sur le dos. Même de nos jours, beaucoup de Cambodgiens, surtout à la campagne, se font tatouer, aussi, des formules magiques en caractères cambodgiens. Dans les villes chinoises et japonaises, il y a de très grands caractères chinois ou japonais partout et bien éclairés la nuit. Ils sont fiers de leur écriture.

Dans ces conditions, comment pouvons-nous former rapidement un grand nombre de savants, de scientifiques, d’ingénieurs, de médecins, de techniciens en langues étrangères hétéroclites ? Pourquoi, tous les pays de notre région ont-ils choisi l’enseignement universitaire en leur langue nationale avec le succès que l’on connaît ? Pourquoi sommes-nous les seuls à mépriser notre langue maternelle, pourtant la plus vieille avec l’écriture la plus harmonieuse dans notre région ? Notre très grand retard par rapport à nos voisins ne s’explique-t-il pas par ce mauvais choix ?

L’utilisation de notre langue dans les universités entraîne automatiquement le développement et l’enrichissement de notre langue maternelle. Nos enfants et notre peuple, auront alors, à leur disposition, des livres de vulgarisation à tous les niveaux. Notre langue sera en mesure d’exprimer toutes les nuances de la pensée et des connaissances de la civilisation mondiale. Il y aura alors des relations harmonieuses entre les parents et leurs enfants toujours plus instruits. Il y aura de bonnes relations entre les générations. L’enseignement de nos universités en langues étrangères n’est-il pas une façon de choisir la voie des pays africains qui restent éternellement des pays pauvres ? De nos jours, seule une petite minorité d’enfants de gens bien nantis ont des moyens pour suivre des cours en langue étrangère.

D’autre part plus la base de la pyramide est large, plus son sommet est haut. Le Vietnam forme annuellement 30 000 ingénieurs de haut niveau dans des universités utilisant la langue vietnamienne comme langue véhicule. La Société américaine Intel est en train de construire une usine de un milliard de $US pour fabriquer des puces électroniques. Le Vietnam envisage de construire une centrale électrique nucléaire etc. Pour nous Cambodgiens, persister dans le choix des langues étrangères comme langues véhicules dans nos universités, n’est-il pas accepter d’avance la mort de notre langue ? Au profit des langues de nos voisins ? Avant d’être absorbés par les Vietnamiens et les Thailandais ?

En effet, dans de nombreuses familles cambodgiennes à l’étranger, les enfants ne parlent plus notre langue. Ce sera bientôt au Cambodge. Une langue méprisée par la jeune génération aura-elle un avenir ?

Voilà la situation de notre pays au moment du passage à la nouvelle année Chnam Chout 2552. Nous souhaitons que l’année nouvelle apporte des améliorations importantes pour combler les fossés de nos points faibles énoncés ci-dessus.

Nous souhaitons que nos sœurs, frères et compatriotes du Kampuchea Krom remportent de nouveaux succès dans leur lutte pour préserver leur identité culturelle, plus particulièrement religieuse et linguistique orale et écrite.

Nous souhaitons de nouveaux succès dans la lutte pour préserver notre langue écrite et plus particulièrement pour son utilisation dans nos universités comme langue véhicule. Que notre langue écrite s’affiche fièrement partout avec des caractères de plus en plus grands à l’instar des villes chinoises et japonaises pour les caractères chinois et japonais ! Que des Cambodgiens de plus en plus nombreux, surtout parmi les jeunes, soient fiers de leur langue parlée et écrite ! Une culture sans le support de l’écrit est une culture en voie de disparaître.

Nous souhaitons qu’un dictionnaire de la langue cambodgienne, comprenant les mots scientifiques, techniques, philosophiques et autres, soit publié le plus rapidement possible. Nous souhaitons la publication des livres scientifiques, techniques, mathématiques, philosophiques en langue cambodgienne de niveau universitaire. Pour ces traductions, il faut utiliser les termes scientifiques et mathématiques maintenant universellement utilisés, comme chez la plupart des pays de notre région. En effet il suffit de transcrire ces termes en caractères cambodgiens et au besoin avec un lexique à la fin pour les retranscrire en caractères latins. Il faut remarquer que toutes les formules chimiques et autres, les équations etc. sont les mêmes dans toutes les langues. Les Chinois et les Japonais sont obligés d’écrire leurs livres scientifiques horizontalement de gauche à droite et non de haut en bas et de droite à gauche. Après nous aurons des savants qui amélioreront nos traductions des sciences et des mathématiques.

Nous souhaitons la publication des traductions en cambodgiens des livres de la culture mondiale en tout genre pour permettre à notre peuple d’avoir des informations sur ce qui se passe dans le monde au point de vue de l’évolution des idées.

Nous souhaitons que des bonnes routes de plus en plus nombreuses soient construites le plus rapidement pour permettre un développement rapide du commerce entre les villes et la campagne et par-là même renforcer la solidarité entre les villes et la campagne base de notre solidarité nationale.

Nous souhaitons, en particulier, que la route entre Kompong Thom et Preah Vihear soit construite le plus rapidement ainsi que la route entre Sisophon et la ville de Siem Reap !

Pour terminer nous souhaitons Santé, Longévité, Succès et Bonheur à tous nos lecteurs et leurs amis et à tous nos compatriotes où qu’ils se trouvent.

Khemara Jati
khemarajati@sympatico.ca
http://groups.google.com/group/khemarajati?hl=fr

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