2006-11-09

Le Viêt-Nam a envahit de nouveau le Cambodge

CAMBODGE :

Le Vietnam a envahit de nouveau le Cambodge

Khemara Jati
Montréal, Québec
Le 4 novembre 2006

D O C U M E N T

Extrait du
RAPPORT DE LA « TASK FORCE »
Remis à
LA CHAMBRE DES REPRÉSENTANTS DES U.S.A.
Signé par
YOSSEF BODANSKY ET
VAUGHN S. FORREST

daté du 26 avril 1990

"Il est de plus en plus certain que le Vietnam est en train de consolider son contrôle sur le Laos et le Cambodge malgré l'intensification de la lutte pour la libération nationale contre les régimes fantoches installés par les Vietnamiens dans ces pays. Hanoï proclame en parole qu'il retire ses troupes. Mais en fait Hanoï a comme objectif à long terme, une solution dans le Sud-est asiatique, basée sur une région unifiée sous le contrôle du Vietnam. Actuellement l'existence de régimes fantoches locaux à Phnom Penh et à Vientiane sert les intérêts de Hanoï. Les forces armées vietnamiennes et les forces locales qu'elles contrôlent facilitent le soutien des régimes alliés dans les secteurs clefs du Cambodge et du Laos.

"Il y a, en effet des indications que le Vietnam est en train de chercher un arrangement régional alors que l'Armée populaire du Vietnam (APVN) est sur le point de finir de mettre au point une structure de commandement régionale sous les ordres directs de Hanoï. Dans les régions du Laos et du Cambodge où ces opérations sont les plus avancées, cette orientation de la politique de Hanoï se traduit par la formation des unités (militaires) dominées par les Vietnamiens et l'organisation de structures commandement de l'APVN sans tenir compte des frontières nationales. Prises dans son ensemble, ces opérations reflètent les intentions et la détermination de Hanoï de dominer le Sud-est de l'Asie."...

"Après une brève période de grands mouvements de troupes pour montrer ostensiblement que les forces vietnamiennes ont quitté le Cambodge, le déploiement des forces vietnamiennes se stabilise. Actuellement, les Vietnamiens continuent à maintenir leurs forces dans les points stratégiques clefs et à étendre les zones sous leur contrôle. Adoptant la doctrine sovieto-cubaine, ces forces de l'APVN utilisent le principe des opérations "Quality Edge" (Soutiens qualitatifs). C'est-à-dire, elles soutiennent les unités locales dans les combats contre les forces de libération nationale pour leur donner à peu près les mêmes qualités que l'APVN. Plus précisément, invariablement, les Vietnamiens fournissent les soutiens décisifs dans toutes les batailles en tenant dans les mains les facteurs stratégiques de décision, comme la puissance de feu de destruction constituée par l'artillerie et l'aviation (y compris l'utilisation des armes chimiques), aussi bien que les moyens de déplacements tactiques comprenant le parachutage des forces d'élite par hélicoptères aux points clefs."

"Ainsi il est évident que les Vietnamiens se préparent à une solution pour le long terme. Dans ce contexte, leur stratégie est de ne se battre militairement contre les forces de libérations nationales que quand c'est nécessaire. Les Vietnamiens et leurs alliés concentrent leurs efforts pour contrôler les infrastructures stratégiques et les zones économiques clefs. Ce faisant les Vietnamiens sont en mesure d'isoler la résistance de ses bases de soutien dans la population civile. Ils utilisent la puissance de feu de l'artillerie et de l'aviation (y compris l'utilisation des armes chimiques), pour obliger la population à fuir les régions où la résistance peut trouver des ressources et des soutiens et à rejoindre les zones contrôlées par eux."...

"Le déploiement actuel des forces vietnamiennes au Cambodge est accompli en deux phases. La première phase est accomplie pendant le "retrait" de fin 1989. Les unités les plus importantes de l'APVN et quelques unités secondaires sont laissées sur place en des points stratégiques clefs. Chacune des unités secondaires commande à quelques unités des FARPK (Forces Armées de la République Populaire du Kampuchea), ayant des noyaux durs de qualités comparables à celle de l'APVN. Les Vietnamiens cachent des dépôts d'armes et de munitions dans la campagne. En outre les forces vietnamiennes effectivement retirées du Cambodge, restent toujours groupées, juste derrière les frontières, en quatre endroits, (du sud au nord: front 479, front 979, front 779, front 579) avec des terrains d'entraînement et des stocks de munitions. Elles sont prêtes à retourner pour intervenir au Cambodge. La seconde phase est encore en cours. Elle consiste en retour de petites unités au Cambodge pour consolider les positions et garnisons dans les principales installations militaires, à partir desquelles, des petites unités vietnamiennes indépendantes ou des unités des FRAPK sous leur commandement, se répartissent dans des petits postes ou garnisons dans les campagnes, étendant ainsi graduellement les zones sous le contrôle de Hanoï et déplaçant la population rurale à leur guise.

"En plus, Hanoï développe ses centres stratégiques d'intervention régionale sur les frontières Lao-Cambodge-Thaïlande. Sur l'île vietnamienne Phu Quoc, l'infanterie navale de l'APVN, subordonnée à la division F590, est destinée à contrôler les principaux ports du Cambodge. (Ces activités à l'échelle régionale sont décrites en détail ci-dessous.)"

Le déploiement actuel des forces de l'APVN et des FARPK sous leur commandement (à l'exclusion des provinces annexées et de la force d'intervention régionale), est contrôlé par un Groupe de Quartiers Généraux (GQG) installé dans le sud-est de la province de Pursat où sont déployés 7,000 hommes à 46,970 hommes de l'APVN. (Ce total ne comprend pas les multiples petites garnisons qui tapissent un peu partout le Cambodge rural.)"...

"Les troupes cambodgiennes placées sous le commandement de ce GQG sont divisées en deux Échelons Stratégiques (ES): le Commandement Ouest constitue l'Échelon numéro 1 qui à son tour est divisé en deux Fronts. Le Front Nord est destiné à coordonner les opérations menées par des combattants autonomes à partir de la Thaïlande. Le Front Sud est destiné à assurer la sécurité des principales lignes de communication en provenance du Sud-Vietnam et celle des rivages maritimes du Cambodge. L'Échelon numéro 2 est le Commandement Est qui est destiné à contrôler l'intérieur du Cambodge et spécialement l'intérieur des terres et les transports fluviaux.

"Cette structure de commandement reste intacte même durant la période la plus active du "retrait" des troupes vietnamiennes. En effet, le GQG et son personnel de quelques 7,000 hommes restent bien à l'intérieur du Cambodge fin 1989: le contrôle du Front Nord de l'Échelon numéro 1 est assuré par deux régiments de l'APVN "laissé sur place" (1,200 et 3,000 hommes respectivement). Ces régiments contrôlent à leur tour 3 divisions des FARPK (288ème, 5ème et 81ème) dont le noyau dur est composé d'hommes de l'APVN, et 2 divisions des FARPK (196ème et 4ème) avec seulement des éléments des forces spéciales de l'APVN, toutes déployées le long de la frontière thaïe. Le contrôle du Front Sud de l'ES numéro un est assuré par un seul régiment de l'APVN "laissé sur place" (5,000 hommes spécialisés dans la sécurité intérieure). Ce régiment contrôle aussi 2 divisions des FARPK dont le noyau dur est composé d'hommes de l'APVN, déployées le long des cours d'eau. Pendant le "retrait", le contrôle de l'ES numéro 2 est assuré par 2 régiments de l'APVN (3,000 hommes chaque) cantonnés dans l'est de Kompong Cham, province proche de la frontière vietnamienne. Une division des FARPK dont le noyau dur est composé d'Hommes de l'APVN, stationnée au centre de la province et placée sous le commandement de cette force. En tout, environ 27,000 soldats restent déployés au Cambodge dans cette structure quand le "retrait" est déclaré complet.

"L'expansion et le renforcement de ce dispositif commencent en octobre 1989 et continuent à progresser. Le déploiement dans le Front Sud de l'ES numéro 1 se renforce d'une façon significative. Le Front Nord de l'ES numéro 1, pour assurer les principales lignes de communications, obtient des renforts. D'autre part, les Vietnamiens construisent graduellement leurs garnisons près de Phnom Penh et dans Kompong Thom où un régiment de l'APVN de 1,560 hommes assure les communications vers le nord. Par ailleurs, plusieurs bataillons et compagnies sont toujours au Cambodge pour développer le déploiement de l'APVN. Des bataillons de l'infanterie de Marine de la division F590 de l'île de Phu Quoc ont débarqué dans la province de Kampot (1,000 hommes), et à Thmar Sar (450 hommes). Finalement, cela fait environ un total entre 18,310 et 18,610 hommes de l'APVN sont réintroduits au Cambodge entre le 1er octobre 1989 et le 2 mars 1990.

"Les unités de l'APVN et les FARPK sous leur contrôle continue à étendre les régions couvertes par leurs opérations. Leurs objectifs principaux sont de démanteler les axes de pénétration des forces de libération nationale et d'avancer dans les zones contrôlées par ces dernières. Elles continuent à lancer des offensives près des frontières de la Thaïlande, pour affaiblir les combattants pour la liberté et pour empêcher leur avance à l'intérieur du pays. Simultanément les bombardements par l'artillerie et par l'avion vietnamien sont destinés à tuer la population civile, à les forcer à s'écarter des lignes principales de communication et à se réfugier plus à l'intérieur du pays, de telle sorte qu'elle ne peut plus avoir de contact avec les combattants pour la liberté et par suite apporter leur soutien."...

"Par cette stratégie, le Vietnam espère consolider sur des régions vitales du Cambodge. Il a annexé déjà effectivement trois provinces et traçant de nouvelles frontières dans d'autres zones. Dans les provinces du sud, les Vietnamiens finissent de creuser un canal long de 550 kilomètres de Kep-Hatien sur le Golfe de Thaïlande jusqu'à Chipou. Le canal est large de 25 mètres et se trouve de 4 à 5 kilomètres à l'intérieur des terres cambodgiennes. Le Vietnam a donc déjà annexé cette bande de terre. Dans les provinces de l'est, une nouvelle frontière est tracée entre Chipou et la région de Bo Duc, plaçant sous son contrôle les hauteurs et les routes principales. Toute la région à l'est de cette ligne est également annexée par le Vietnam.

"Encore plus significatif est l'annexion par le Vietnam des provinces cambodgiennes de l'est Mondulkiri, Rattanakiri et Stung Trèng (à l'est du Mékong). L'annexion se fait par l'installation massive de quelques 400,000 à 950,000 Vietnamiens qui ont leur propre milice de 100,000 hommes. Les colons vietnamiens exploitent les mines d'or, (les mines de pierres précieuses NDK), les forêts de très vieux arbres et y interdisent les autorités cambodgiennes de s'y rendre. L'administration de cette région est faite par le Groupe de Quartiers Généraux F7579 à l'est de Lomphat, avec trois régiments de l'APVN pour la sécurité intérieure (les 5501è, 5502è et 5503è). En plus trois unités plus petites - de la taille d'un bataillon à celle d'un régiment - stationnent également dans ces provinces. Ce déploiement reste intact pendant l'opération de "retrait". Maintenant il est soutenu par les forces du Front 579 déployés à cheval sur frontière vietnamienne."...

"Plus important est l'organisation d'une force multinationale dominée par l'APVN, près des frontières Lao-Cambodge-Taïlande. Le noyau de cette force est composé de deux divisions de l'APVN. Au Cambodge c'est la division F315 basée dans la province du nord de Pré Vihear (les 7,000 hommes d'avant l'opération de "retrait", sont maintenant renforcés par l'arrivée de 2,200 autres à la fin de 1989). Juste au nord des frontières du Laos sont 4,000 hommes de la division F2 de l'APVN, soutenus par un régiment indépendant de l'APVN un peu plus au nord. Ces unités vietnamiennes servent somme Soutien Qualitatif (Quality Edge) pour les unités cambodgiennes et laotiennes qu'elles dirigent. Ces forces combinées subissent un entraînement très poussé et sont supervisées par des conseillers et experts soviétiques. Certaines de ces forces d'élite de l'APVN sont envoyées fin novembre 1989 pour soutenir les opérations sur la route no 10 entre Battambang et Païlin. Ces troupes vietnamiennes portent les uniformes des FARPK.

"Une autre "Division indépendante" multinationale d'élite est entraînée par les Vietnamiens au sud de la province de Mondulkiri, dans la région tenue par les régiments 5501 et 5503. Ces troupes sont entraînées avec les uniformes des "para" et utilisent un drapeau cambodgien spécial. On note la présence des conseillers soviétiques dans des camps d'entraînement. Ces troupes seront déployées dans la région des frontières Lao-Cambodge-Thaïlande."...


NOS COMMENTAIRES :

Ce rapport fait l'objet d'un article dans le journal New York City Tribune du 8 mai 1990.

Pour comprendre la révolution de la géostratégie des USA en Asie du sud-est, voici une chronologie des événements en 1989-1990.

§ 9 novembre 1989: Chute du mur de Berlin.
§ 26 avril 1990: Rapport de la Chambre des Représentants des USA dont nous venons de donner quelques extraits.
§ 18 juillet 1990: De retour de Moscou, James Baker, Secrétaire d'État des USA, ne soutient plus le Gouvernement de Coalition du Kampuchea Démocratique.
§ 16 au 27 septembre 1990: Mission de François Ponchaud au Cambodge. Dans son rapport il écrit:

"En me rendant au Cambodge, je n'ai pas cherché à rencontrer les communautés vietnamiennes catholiques du Cambodge, sinon le petit groupe de Moat Krasas. J'ai cependant accompagné deux prêtres américains qui se rendaient à Kompong Chhnang pour y célébrer la messe pour les Vietnamiens. Une petite communauté d'une centaine de personnes s'y réunie sur la terrasse d'un immeuble du marché, pavoisée aux couleurs du Vatican. Les prêtres célèbrent habituellement en américain, avec traduction en vietnamien. J'ai été invité au repas qui suivit la messe: tous les participants masculins de ces agapes étaient membres de l'Association (politique) des Résidents Vietnamiens du Cambodge, et ne faisaient aucun mystère des liens qui les unissaient à l'ambassade (du Vietnam à Phnom Penh)."

De la présence des Vietnamiens dans cette ville, Ponchaud écrit: "À Kompong Chhnang, au "marché en-bas", il faut avoir de bonnes lunettes pour décrire des Khmers! ".

Ainsi le rapport de la Chambre des Représentants des USA décrit avec précision les intentions réelles de Hanoï dans la région. Mais les intérêts géostratégiques des USA commandent le rapprochement avec le Vietnam. Les USA ont-ils les moyens de sa politique? C'est au peuple cambodgien à la ville comme à la campagne de démontrer leur volonté de lutte contre la domination vietnamienne et obliger les USA de réviser sa politique cambodgienne. q

[Fin]

Posté par Khemara Jati
khemarajati@sympatico.ca

Note : This article is also available into english upon request.

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