Qui succèdera au Professeur Long Seam ?
Nouvelles du Cambodge N° 0747-F
QUI SUCCÈDERA AU PROFESSEUR LONG SEAM ?
Khemara Jati
Montréal, Québec
Le 12 décembre 2007
Une inscription, en sanscrit et en ancien cambodgien datant du règne de Udayaditiyavarman II -1050-1066 (Udaya Aditiya Varman = Soleil Levant Protecteur), a été découverte en 1990, dans la province Nokor Reachsima, une province centrale de la Thailande actuelle. Cette inscription a été traduite aussitôt en anglais par le professeur Thai : Chirapat Prapandvidya et publié dans « The Journal of Siam Society », Vol. 78, Part 2, 1990. Nous remercions le professeur Ang Choulean pour la traduction en Cambodgien moderne de la phrase concernant le patriotisme des Cambodgiens du début du XIIè siècle et pour attirer notre attention sur ce passage.
(Voir l'image extrait du : http://ki-media.blogspot.com/search/label/Nokoreah%20stone%20inscription)
1/. Cette découverte montre que la civilisation angkorienne s’étendait sur la totalité de la Thailande civilisée de l’époque. Il n’y a encore aucune étude sérieuse sur l’histoire de cette civilisation angkorienne en Thailande qui a duré sur plusieurs siècles. Récemment il y avait une carte du Cambodge tracée avec des relevés américains, fournis par satellite, concernant l’occupation du sol durant la période angkorienne. Cette carte confirme pleinement les résultats des fouilles archéologiques de Bernard Philippe Groslier et consignés dans son immortel article « La Cité Hydraulique Angkorienne : Exploitation ou Surexploitation du Sol ? », publié dans le Bulletin de l’Ecole Française d’Extrême-Orient, de 1979. Avant 1970, B.P. Groslier est le seul à entreprendre des vraies fouilles archéologiques au Cambodge. Pour lui, il faut confronter les documents écrits avec les fouilles archéologiques. Car avant lui l’archéologie consistait à faire l’inventaire des parties visibles et à les décrire. Mentionnons aussi qu’avant les années 1990, il n’y avait aucun archéologue cambodgien. Maintenant il y a des vraies fouilles archéologiques qui révèlent notre passé bien lointain que la période du Fou Nan. Les résultats de ces fouilles sont toujours écrits en langue étrangère. Il faut aussi noter que Groslier essaie de placer notre histoire dans les échanges commerciaux internationaux de l’époque.
Malheureusement les historiens étrangers préfèrent expliquer l’abandon d’Angkor par un certain Bruno Dagen, un historien qui n’a jamais fait la moindre fouille archéologique au Cambodge. D’après Dagen, la faiblesse d’Angkor résiderait dans la mégalomanie de ses rois (sic) ! Un autre historien du Cambodge bien connu : Claude Jacques, dans la revue Science et Vie N° 201 de décembre 1997, se demande à quoi sert le système hydraulique angkorien ? Pour l’agrément des rois ? En tout cas, pas pour l’agriculture (sic) ! Nous reviendrons sur les erreurs dans d’autres livres d’histoire du Cambodge, écrits par des étrangers. Il est curieux de noter que les étrangers n’aiment pas les écrits de l’éminent historien du Cambodge Bernard Philippe Groslier au point d’ignorer son nom lors de l’inauguration récente de l’immense monument montagne de Baphuon. Nous souhaitons que les Cambodgiens désireux de connaître notre histoire de consulter et étudier les écrits de B. P. Groslier. Ses articles les plus importants sont réunis par son collaborateur Jacques Dumarçay dans le livre « Mélange sur l’archéologie du Cambodge » Ed. Ecole Française d’Extrême-Orient, Paris 1997. Il est aussi important de lire sa biographie très intéressante par Georges Condominas et autres souvenirs sur lui, en particulier sa part déterminante dans la restauration de Baphuon, dans le livre « Disciplines Croisées Hommage à Bernard Philippe Groslier », Ed. Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, Paris 1988.
Malheureusement la carte de l’occupation du sol, mentionnée plus haut, se limitait seulement à la partie occupée par le Cambodge actuel. Il est souhaitable de disposer aussi d’une telle carte pour la partie actuellement occupée par la Thailande. Jusqu’à présent seul Bernard Philippe Groslier, qui a contribué à la restauration des monuments angkoriens en Thailande, en a eu l’idée, sans avoir eu le temps de la concrétiser. Peut-être y a-t-il des documents sur ce sujet dans ses archives ? Malheureusement, ses archives sont encore inaccessibles ou très difficilement accessibles.
2/. En Thailande il y a des savants capables de lire et de traduire en thaï, en anglais et même en cambodgien moderne, les inscriptions angkoriennes. Au Cambodge, à part notre regretté Long Seam, qui est capable d’en faire autant ? De nos jours, y a-t-il des Cambodgiens capables de traduire les inscriptions angkoriennes en cambodgien moderne ? Sommes-nous déjà tributaire, au point de vue intellectuelle, culturelle et linguistique des professeurs Thaïs ? Une fille du roi de Thailande est réputée pour son érudition et sa connaissance de notre langue. Elle connaît aussi parfaitement l’histoire de son pays et aussi tous les monuments angkoriens en Thailande et au Cambodge. Une information à méditer. Notons aussi que dans les archives thaïes, beaucoup de documents de la période angkorienne sont encore inaccessibles aux étrangers.
De nombreux Cambodgiens gagnent énormément d’argent et sont des multimillionnaires en euros ou en dollars. Pourquoi ne créent-ils pas des organisations pour financer les études des Cambodgiens en histoire dans les universités et non sous la direction des historiens connus du Cambodge, pour former des professeurs de niveau des professeurs Thaïs ? Car pour comprendre notre histoire il faut aimer notre pays comme B. P. Groslier. Il faut aussi que les étudiants cambodgiens apprennent d’abord le métier d’historien et l’histoire du monde, avant d’aborder l’histoire de notre pays. Sinon faut-il, seulement, passer notre temps à attendre le bon vouloir des grandes puissances ? A ne lire que des livres d’histoire de notre pays, écrits par des étrangers ? Des livres qui ne montrent que nos faiblesses ? Un dicton dit « Aide-toi, le ciel t’aidera ».
Au Cambodge, il y avait le Professeur Long Seam qui a le très grand mérite de publier le premier « Dictionnaire du Khmer Ancien », où l’écriture ancienne est traduite en écriture moderne. Dans ce dictionnaire nous admirons la beauté esthétique de notre écriture ancienne et moderne.
Quand nous voyageons en Chine et au Japon, il n’y a que des caractères chinois ou japonais de toutes les dimensions, de jour comme de nuit. Au Cambodge, on semble avoir honte d’étaler notre très belle et très esthétique écriture. Pourquoi ? Dans des films cambodgiens aussi, on voit peu ou pas du tout, notre écriture !
3/. Richer dit que notre écrit est difficile à apprendre. Pourquoi les Européens et les Anglo-saxons, de plus en plus nombreux, se mettent-ils à apprendre les idéogrammes chinois et japonais qui sont mille fois, plus compliqués que notre écriture ? Nous reviendrons sur les tentatives de romaniser notre écriture et la romanisation actuelle, utilisée par l’Ecole Française d’Extrême-Orient.
Nous souhaitons que bientôt de nombreux autres Professeurs Long Seam, prennent rapidement le relais et donnent au Cambodge des Professeurs de haut niveau, capables de nous fournir les traductions en cambodgien moderne, l’ensemble de nos inscriptions anciennes et commencent la rédaction de notre histoire qui soit la plus proche possible de la réalité. Une histoire nationale est toujours écrite par les historiens de cette nation. Se fier totalement aux livres d’histoire, écrits par des étrangers, c’est confier notre avenir aux décisions des étrangers. Cela ne veut pas dire que tous ces livres d’histoire sont à rejeter en totalité. Mais il faut savoir trier et extraire des informations, souvent à l’insu de l’auteur, intéressantes pour notre histoire ? Nous l’illustrerons dans un autre article. Car souvent nous n’avons pas accès à certaines archives. Jusqu’à présent aucun historien ne tient compte de l’arrivée dans notre région des Portugais, suivis des autres Européens, à partir de la prise du port de Malacca en 1511. Or depuis cette date jusqu’à nos jours toute l’histoire du monde en est bouleversée.
4/. Le souhait de renaître cambodgien est aussi contenu dans le livre de Boun Chan Mol « Kouk Nyaubay ». Se contenter d’un tel souhait est-il suffisant pour libérer notre pays de la domination vietnamienne ? Car un souhait reste toujours un souhait. Le plus important est de s’unir pour la création des organisations capables de faire en sorte que Long Seam ne soit pas le seul à comprendre l’importance de notre héritage culturelle. L’expérience de l’histoire du monde montre que l’écrit est un facteur fondamental pour assurer la pérennité d’une culture, d’une nation. La danse, la pagode etc. ne sont que les parties visibles de l’iceberg culturel. L’immense partie invisible de l’iceberg est l’écrit. C’est toute l’histoire de l’humanité qui le confirme. Tous les historiens disent que l’homme a conscience de l’histoire avec la naissance de l’écrit, il y a six mille ans.
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