2006-12-23

Le pouvoir de la langue nationale

Nouvelles du Cambodge N° 0662-F

LA LANGUE NATIONALE, ARME FONDAMENTALE POUR LIBÉRER NOTRE PAYS DE TOUTE DOMINATION ÉTRANGÈRE

Khemara Jati
Montreal, Quebec
December 21, 2006

“Aksar rolaot cheat roleay
Aksar ponnareay cheat thlai thla”

- If letter disappears, the nation disappears
If letter is brilliant, the nation is excellent -


L’identité culturelle est un concept anthropologique qui désigne une période historique pendant laquelle une communauté, un peuple se reconnaît par des valeurs précises dans ses pratiques, ses concepts, ses pensées, ses croyances, son art etc.

La langue d’un peuple est un outil au service de ce peuple pour transmettre de la pensée. Comme pour toute transmission il existe une fonction d’émission et une fonction de réception : une langue permet de s’exprimer et de comprendre entre individus d’un même peuple. Elle fait partie de notre patrimoine culturel.

La langue d’un peuple est un héritage d’un passé plus ou moins lointain. Chaque mot, chaque expression contient une charge de signification, de sentiment légué par l’histoire qu’il est difficile de traduire dans une autre langue. Il suffit de le constater dans la traduction de la sentence léguée par nos ancêtres, reproduite ci-dessus. Les différences de nuance et de sens entre le texte original et sa traduction ne peuvent être comprises que par une personne qui connaît parfaitement les deux langues. D’ailleurs cette difficulté faite qu’on dit que traduire c’est trahir.

Chaque mot d’une langue a une histoire, même si le locuteur l’ignore. Les mots légués par nos ancêtres forgent la façon de pensée d’un peuple. Certes le sens de chaque mot évolue avec la société, mais il reste toujours compréhensible pour les composants de cette société. Le français du québécois a évolué différemment du français de France. Les accents ne sont plus les mêmes. Heureusement de nos jours les facilités des communications en tous genres et des relations humaines et culturelles permettent d’atténuer ces évolutions divergentes.

La langue est le support de l’identité culturelle. L’écrit rend une langue vivante dans la durée, il est le support de l’histoire. Le concept même de l’histoire, est né avec l’écrit. L’écrit est donc la base de notre identité culturelle, la base de notre unité culturelle.

Pour préserver sa culture et son identité, une nation se doit de valoriser sa langue. La langue d’un peuple est son patrimoine le plus précieux. Perdre sa langue c’est perdre son identité, son passé et rendre son histoire incompréhensible.

Nos compatriotes au Cambodge ont bien compris cette importance de notre langue écrite. Le premier « Dictionnaire du Khmer Ancien (traduit en langue cambodgienne de nos jours) a été publié en l’an 2000 par le Professeur Long Seam, financé par la Fondation Toyota du Japon. Il est souhaitable que les Cambodgiens qui veulent aux sources de notre langue et de notre écriture possèdent ce Dictionnaire. Il ne coûte que 25 $US. Ils peuvent alors comparer l’écriture et la langue anciennes de nos ancêtres (VIè siècle) avec l’écriture et la langue de nos jours. C’est cette langue et cette écriture, qui ont préservé jusqu’à nos jours notre identité culturelle nationale.

Signalons aussi que grâce au regrettée Ingrid Muan, une Américaine d’origine Suédoise, le Cambodge possède maintenant des imprimeries modernes. Les livres, revues, journaux et autres écrits en langue nationale de bonne qualité sont maintenant disponibles dans des librairies florissantes.

Nous reproduisons ci dessous deux articles parus dans le journal Cambodge Soir du 21 décembre 2006.

« Les ordinateurs savent parler khmer’
« Avec l’émergence du khmer en informatique, les cracks de la saisie »

Il y a donc des Cambodgiens connaissant bien notre langue, notre écriture et l’informatique qui ont collaboré des années pour arriver à ce résultat extrêmement important pour permettre à nos compatriotes de se communiquer à travers le monde et aussi à rendre plus aisée la saisie des textes en cambodgien.

Note : This article is also available into english upon request.
Cambodge Soir
Le 21 décembre 2006
Les ordinateurs savent parler khmer
L’Organisation gouvernementale NIDA et la fondation Wordforge ont lancé en 2004 un projet destiné à permettre aux Cambodgiens non anglophones d’utiliser l’outil informatique dans leur propre langue, le khmer. La première étape de cette « Khmer Software Initiative » (KhmerOS) a consisté à intégrer le khmer dans le système unicode, un standard international de codification des caractères, utilisable sur la plupart des plate-formes et navigateurs Web, après une installation rapide et simple. Des claviers khmers standards, mis au point par le DiDA, ont commencé à être distribués dans les administrations et sont désormais disponibles dans le commerce.
KhmerOS a aussi développé en l’espace de deux ans un ensemble d’outils informatiques en langue khmère. La suite OpenOffice 2.0, qui comprend des logiciels bureautiques (aux fonctions similaires à celles des Word, Excel, Access et Power Point du Pack Office de Microsoft), a été adaptée intégralement en khmer. De source libre (et donc exploitable et modifiable à loisir), elle présente un gros avantage : elle est gratuite ! De même, d’autres logiciels, tel un gestionnaire de messagerie, Moyoura, et un navigateur Web, Mékhala, ont été développés en khmer et sont gracieusement mis à disposition des internautes.
Informations et téléchargement gratuits sur www.khmeros.info

Cambodge Soir
Le 21 décembre 2006
Avec l’émergence du khmer en informatique arrivent les cracks de la saisie
Tuon Samân tape vite et sans ba­vure, et a même gagné un prix pour cela. Ce jeune professeur, qui en­seigne l'informatique dans un or­phelinat de l'ONG Aspeca à Siha­noukville, a été sacré homme le plus rapide du Cambodge, lundi, à l'issue de la finale du tout premier concours national de saisie de textes en khmer Unicode et de création de do­cuments bureautiques avec des lo­giciels de langue khmère.
Après une première série de tests organisés durant quatre semaines dans dix-sept provinces, à laquelle près de 1 000 personnes ont partici­pé, 37 concurrents ont été sélec­tionnés et se sont affrontés à Phnom Penh en finale, lundi, devant des écrans d'ordinateur. Le but du jeu: taper le plus vite possible un texte en Khmer Unicode puis mettre en for­me le plus rapidement possible un document bureautique type en utili­sant la suite de logiciels libres de droit et en langue khmère OpenOffice.
Cinq lauréats ont ainsi montré tou­te leur dextérité. Le champion, Tuon Samân, travaille pour l'Aspeca de­puis 2000, année de l'ouverture des premiers ateliers informatiques dans cette ONG d'aide à l'enfance. Il est secrétaire du collège de for­mateurs de cette association, qui compte aujourd'hui, parallèlement à ses nombreuses activités, 15 ate­liers informatiques auxquels participent quelque 400 élèves.
Preuve que dans ce domaine la valeur n'attend point le nombre des années, le vice-champion de ce concours, Eng Titya, élève au collè­ge Net Yang de Battambang, n'est âgé que de douze ans. Les trois prix suivants ont été attribués à deux étudiants de l'Université royale de Phnom Penh (URPP) et à un élève de Kompong Cham.
Organisée sous la houlette de l'Autorité nationale pour le dévelop­pement des technologies de l'infor­mation et de la communication (NiDA), assistée de la fondation Wordforge (une organisation de dé­fense des "langues menacées nu­mériquement") et avec le soutien d'lnWent (une société allemande spécialisée dans la coopération in­ternationale), cette manifestation a surtout eu le mérite de prouver qu'utiliser un ordinateur en langue khmère n'est désormais plus un casse-tête réservé aux seuls "nerds" (jeunes intoxiqués d'infor­matique). Les outils développés dans le cadre du projet KhmerOS permettent désormais à tout utilisa­teur khmérophone de faire de la bu­reautique ou de naviguer sur Inter­net sans avoir recours à une autre langue. "'Avec les outils développés par KhmerOS, il n'est plus obliga­toire de maîtriser l'anglais, souligne Jean- Yves Fusil, coordinateur des ateliers informatiques de l'Aspeca. Auparavant, les élèves de nos ate­liers commençaient les cours vers l'âge de 14ans. Aujourd'hui, des en­fants commencent à apprendre à utiliser un ordinateur vers 10 ans." Un jeu d'enfants !
Laurent Le Gouanvic

Publié par Khemara Jati
Montréal, Québec
Le 21 décembre 2006

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